LETTRE DE BELGRADE
Ce bout de trottoir en plein centre de Belgrade est brusquement devenu tout un symbole de la glorification des criminels de guerre de plus en plus en vogue en Serbie. Tous les jours, des nervis d’extrême droite, dont l’un des assassins du supporteur de football toulousain Brice Taton, mort en 2009 après une violente agression dans les rues de la capitale serbe en marge d’un déplacement de son équipe, y protègent une fresque à la gloire de Ratko Mladic. L’ancien chef militaire des Serbes de Bosnie a été condamné en juin à perpétuité pour son rôle dans le conflit qui a déchiré les Balkans au début des années 1990.
Peinte sur un immeuble privé, elle représente l’ancien général actuellement emprisonné aux Pays-Bas faisant un salut militaire. « Général, merci à votre mère pour vous avoir donné naissance », est-il écrit sur son visage. Apparue fin juillet, quelques semaines après le prononcé de la condamnation définitive de Mladic par la justice internationale pour génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre, la peinture murale a choqué dans ce quartier bobo de la capitale, alors que les fresques glorifiant Mladic sont légion ailleurs dans le pays et chez les Serbes de Bosnie. A la demande des autorités municipales, les habitants de l’immeuble ont voulu l’effacer, mais aucune entreprise n’a osé faire le déplacement, s’est plaint le syndic.
« On a communiqué avec eux et proposé de s’en charger », explique Marko Milosavljevic, directeur du bureau serbe de l’Initiative des jeunes pour les droits de l’homme, une ONG qui se bat pour la justice et la vérité dans toute l’ex-Yougoslavie. « Nous avons déclaré à la police que nous allions organiser un rassemblement à cette fin le 9 novembre », date à laquelle la Serbie célèbre la Journée internationale contre le fascisme et l’antisémitisme, « pour envoyer le message à tout le pays mais aussi en Bosnie qu’il est possible d’effacer ce type de peinture qui empêche la réconciliation ». « Mais la police nous a interdit de nous rassembler », déplore cet activiste.
« Parapoliciers »
Malgré cela, plusieurs militants pacifistes se rassemblent tout de même sur les lieux, comme l’ancienne députée Aida Corovic. Cette femme de 60 ans se rapproche de la fresque avec une artiste et elles jettent des œufs, avant d’être violemment écartées par plusieurs hommes habillés de noir et sans insigne de la police. « Ils ont essayé de me tirer dans un coin de rue, j’avais très peur que ce soit des militants qui essayent de me frapper », assure-t-elle aujourd’hui. Ces hommes l’amènent en fait au commissariat, où elle passera quelques heures. Libérée sans poursuite, elle est toujours sous la menace d’une amende pour « dérangement de l’ordre public ».
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