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Aux Etats-Unis, la peine de mort d’un prisonnier commuée au dernier moment

Des personnes mobilisées pour obtenir la commutation de la peine de mort de Julius Jones, le 18 novembre, devant la prison de Norman (Oklahoma). REESE GORMAN / AP

Un Américain qui devait être exécuté, jeudi 18 novembre, en Oklahoma, a vu sa peine commuée à moins de quatre heures de l’injection d’un cocktail létal, après la mobilisation de millions de personnes en sa faveur.

Le gouverneur républicain, Kevin Stitt, a ainsi commué la peine capitale, prononcée en 2002 contre Julius Jones, en peine incompressible de rétention à perpétuité, selon un décret publié sur le site de cet Etat conservateur du sud des Etats-Unis. M. Stitt publie ainsi :

« Après avoir examiné en mon âme et conscience les preuves fournies par les différentes parties, j’ai décidé de commuer la peine capitale infligée à Julius Jones en emprisonnement à vie, sans liberté conditionnelle possible. »

« Julius Jones ne pourra pas demander de nouvelles commutations, de grâce ou de remise en liberté conditionnelle jusqu’à la fin de sa vie », est-il également précisé dans le décret en ligne.

« Une erreur irréparable » empêchée

« Nous remercions le gouverneur d’avoir empêché une erreur irréparable », a commenté l’avocate du condamné, Amanda Bass, dans un communiqué, tout en faisant remarquer qu’elle avait « espéré » qu’il suive « entièrement les recommandations du bureau des grâces ». Ce bureau, qui avait exprimé des doutes sur la culpabilité de M. Jones, avait recommandé à deux reprises de commuer sa peine en prison à vie et de l’autoriser à déposer une demande de remise en liberté anticipée.

« Je suis tellement reconnaissante envers tous ceux qui se sont exprimés et qui ont permis de sauver Julius. Merci au bureau des grâces et au gouverneur Stitt », a réagi sur Twitter la star de télé-réalité Kim Kardashian, l’une des figures de la mobilisation en faveur du condamné.

Julius Jones, un Afro-Américain de 41 ans, est emprisonné depuis bientôt vingt ans pour le meurtre, en 1999, d’un homme d’affaires blanc d’Oklahoma City, et vit depuis dans l’attente de l’exécution de sa peine capitale. M. Jones a toujours clamé son innocence, expliquant avoir été piégé par l’auteur du crime – l’un de ses anciens amis, selon le Washington Post –, avoir été mal défendu par ses premiers avocats, et avoir fait l’objet de discrimination lors du procès.

Plusieurs millions de personnes mobilisées

Madeline Davis-Jones et d’autres proches de Julius Jones lors d’une adresse aux journalistes, le 17 novembre 2021, à Oklahoma City. DOUG HOKE / AP

Ses recours en justice ont tous été rejetés et la famille de la victime, notamment sa fille, reste convaincue de sa culpabilité. Les failles dans le dossier ont toutefois fait l’objet d’une série documentaire, The Last Defense, diffusée aux Etats-Unis en 2018, sur la chaîne ABC, et qui a fait basculer en sa faveur une partie de l’opinion.

A l’approche de la date fixée pour son exécution, des célébrités, des sportifs reconnus et l’ambassadeur de l’Union européenne aux Etats-Unis, mais aussi six millions et demi de personnes, par le biais d’une pétition en ligne, avaient demandé au gouverneur Stitt d’intervenir.

Mercredi, des centaines de lycéens de l’Oklahoma étaient également sortis de leur établissement pour protester et tenter de faire plier le gouverneur. Des manifestants avaient enfin campé près de sa résidence ces dernières nuits, selon la chaîne locale Koco.

Utilisation d’un cocktail létal controversé

Au-delà des doutes sur sa culpabilité, l’exécution suscitait des interrogations, car Julius Jones devait recevoir un cocktail létal de trois substances soupçonnées de causer d’atroces souffrances. L’Oklahoma a renoué le 28 octobre avec les exécutions, après six ans de pause, en faisant usage de ce protocole controversé.

John Grant, un Afro-Américain de 60 ans, a été secoué par des vomissements et des convulsions après la première injection, ont rapporté les journalistes témoins de la scène. Les services pénitentiaires ont assuré qu’il n’y avait « pas eu de complication », mais plusieurs voix ont dénoncé une violation de la Constitution américaine, qui interdit les « peines cruelles ».

Le protocole contesté combine un sédatif, le midazolam, et un anesthésiant, censés empêcher la douleur avant l’injection de chlorure de potassium à dose létale. Il avait été utilisé en 2014 pour exécuter Clayton Lockett, mais le condamné avait agonisé pendant quarante-trois minutes dans d’apparentes souffrances. A la suite de plusieurs d’incidents de ce type, un grand jury avait ouvert une enquête et les autorités avaient accepté de suspendre l’application de la peine capitale. En 2020, elles ont autorisé un nouveau protocole et ont fixé en 2021 plusieurs dates d’exécution. Cinq exécutions restent prévues dans l’Etat de l’Oklahoma d’ici mars.

Le Monde avec AFP

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