Après cent soixante-seize jours de prison, le journaliste américain Danny Fenster va rentrer aux Etats-Unis. Il a été libéré et devait être expulsé du pays, a déclaré lundi 15 novembre à l’Agence France-Presse (AFP) une source gouvernementale birmane.
M. Fenster a été gracié « pour des raisons humanitaires » après des négociations avec l’ancien diplomate américain Bill Richardson et deux émissaires japonais, a déclaré dans un communiqué le service de communication de la junte.
M. Richardson affirme avoir négocié cette libération lors d’une visite en Birmanie, au cours de laquelle il a eu des entretiens en tête-à-tête avec le général Min Aung Hlaing, le chef militaire qui a renversé le gouvernement élu d’Aung San Suu Kyi. Les deux hommes ont discuté de la livraison de vaccins contre le Covid-19 et de matériel médical.
Bill Richardson et Danny Fenster rentreront aux Etats-Unis « via le Qatar, au cours du prochain jour et demi », a déclaré le Centre Richardson. Une photo postée sur Twitter par Bill Richardson le montre à côté de Danny Fenster debout en short et tongs devant un petit avion, sur le tarmac de Naypyidaw, la capitale de la Birmanie.
Governor Bill Richardson and the Richardson Center are thrilled to announce the release of American journalist Dann… https://t.co/dLVuUbHC2u
— RichardsonCNTR (@Richardson Center)
Le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, a salué cette libération. « Nous sommes heureux que Danny soit bientôt auprès de sa famille et nous continuons d’appeler à la libération d’autres qui sont toujours injustement emprisonnés en Birmanie », a souligné le secrétaire d’Etat dans un communiqué.
Condamné à onze ans de prison
Agé de 37 ans, le journaliste, qui travaille pour le magazine Frontier Myanmar, avait été arrêté le 24 mai à l’aéroport international de Rangoun alors qu’il tentait de quitter le pays, et était détenu à proximité de Rangoun, la capitale économique, dans la prison d’Insein avec de nombreux prisonniers politiques. Il était le premier journaliste occidental à être détenu depuis des années en Birmanie. D’autres journalistes étrangers détenus par la junte l’ont été pour des périodes plus courtes, notamment l’Américain Nathan Maung, qui a été libéré en juin, deux semaines après l’arrestation de Danny Fenster. Battu et privé d’eau pendant plusieurs jours au cours de son interrogatoire, M. Maung pense que la diplomatie américaine a permis sa libération.
Vendredi 12 novembre, M. Fenster avait été condamné à onze ans de prison « pour incitation à la dissidence, association illégale et violation de la loi sur les visas », avait déclaré à l’AFP son avocat, Than Zaw. Il devait comparaître mardi devant un tribunal pour terrorisme et sédition, et encourait pour cela la prison à vie.
L’ONU et les Etats-Unis avaient appelé la junte birmane à le libérer, sans délai. « Les journalistes sont attaqués depuis le 1er février, avec les chefs militaires qui tentent clairement de les empêcher d’informer sur les graves violations des droits de l’homme perpétrées dans l’ensemble de la Birmanie, mais aussi sur l’ampleur de l’opposition au régime », avait dénoncé, vendredi, Michelle Bachelet, la haut-commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, demandant à la junte de « libérer immédiatement » Danny Fenster. La diplomatie américaine avait également exigé sa libération, estimant que « le verdict d’aujourd’hui représente une condamnation injuste d’une personne innocente ».
Presse muselée
La Birmanie a sombré dans le chaos depuis le putsch militaire du 1er février qui a mis fin à une parenthèse démocratique de dix ans. Le régime poursuit une sanglante répression contre ses opposants avec plus de 1 200 civils tués et plus de 7 000 en détention, selon l’Association d’assistance aux prisonniers politiques. Cette ONG locale signale des cas de tortures, de viols et d’exécutions extrajudiciaires.
La presse est muselée par la junte qui tente de renforcer son contrôle de l’information, limitant l’accès à Internet et annulant les licences des médias. Plus de 100 journalistes ont été arrêtés depuis le putsch, selon Reporting Asean, une association de défense des droits, qui souligne que 31 d’entre eux sont toujours en détention.
« C’est une nouvelle fantastique pour Danny et sa famille », a déclaré Richard Horsey, spécialiste de la Birmanie, à l’ONG International Crisis Group, selon qui « il n’avait rien fait de mal et n’aurait jamais dû subir cet enfer ». « Il est également important en ce moment de se souvenir des nombreux journalistes birmans qui sont injustement détenus, et qui doivent également être libérés », a-t-il ajouté.
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