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« Ajourner le développement des technologies de l’intelligence artificielle revient à accepter de devenir dépendants, à l’avenir »

Tribune. Le Parlement européen a voté le mercredi 6 octobre une résolution sur l’intelligence artificielle (IA) en droit pénal et son utilisation par les autorités policières et judiciaires dans les affaires pénales, qui selon son rapporteur Petar Vitanov, appelle à « un moratoire sur le déploiement des systèmes de reconnaissance faciale à des fins répressives, ces technologies ayant démontré leur inefficacité et souvent abouti à des résultats discriminants ».

Un tel moratoire aurait pour effet de limiter l’expérimentation et le développement de systèmes d’IA conciliant efficacité et respect des libertés. Or, pour faire émerger de telles solutions européennes, mieux vaut expérimenter qu’interdire. Dans une résolution adoptée par 377 voix pour, 248 contre et 62 abstentions, le Parlement européen affirme une prudence forte quant à l’utilisation de l’IA dans le domaine de la sécurité, marquée par la volonté d’interdire les bases de données privées de reconnaissance faciale, la police prédictive basée sur des données comportementales, ou les systèmes de notation sociale des citoyens.

Le Parlement prend acte des limites de certains logiciels d’IA, qui n’ont pas fait leurs preuves et ne seraient pas entièrement opérationnels à ce jour. Il reprend également la critique, largement documentée par la recherche et les ONG, en particulier aux Etats-Unis, selon laquelle l’utilisation de ces nouvelles technologies ne permettrait pas d’atteindre une neutralité de l’action sécuritaire, mais mènerait au contraire à des biais (raciaux, sexistes, etc.).

Un blocage à l’innovation

Tous ces éléments sont exacts et doivent contribuer à fonder une position européenne marquée par une exigence de garanties fortes et l’interdiction de systèmes d’IA incompatibles avec nos valeurs et nos règles. Comme le souligne la Commission européenne dans sa proposition de règlement du 21 avril 2021 établissant des règles harmonisées sur l’IA, la recherche, l’expérimentation et l’innovation sont nécessaires pour faire émerger des solutions d’IA européennes dignes de confiance.

Or, en appelant à un moratoire, le Parlement européen bloque la voie de l’innovation. C’est un écueil qui rend impossible une analyse pragmatique, puisqu’on s’interdit de tester l’efficacité des dispositifs incriminés. C’est également une manière de se tenir éloigné des éventuels progrès qui pourraient être effectués dans un domaine en pleine effervescence qui innove quotidiennement pour repousser les limites techniques.

C’est enfin se rendre vulnérable en se privant d’une autonomie stratégique : cet ajournement renvoie la responsabilité du développement et de l’utilisation de ces technologies à des puissances rivales ou des entreprises privées étrangères. Ajourner le développement des technologies d’IA revient à accepter de devenir dépendants, à l’avenir.

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