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« Taïwan est l’épicentre de la rivalité entre deux systèmes incompatibles »

Tribune. Le prochain plénum du Parti communiste chinois, qui se réunit à Pékin du 8 au 11 novembre, fournit aux dirigeants chinois une nouvelle occasion pour envoyer au monde quelques morceaux choisis de ses intentions dans l’exercice de sa puissance, chez elle et dans le monde. Mais, n’en déplaise aux Cassandre, une invasion de Taïwan n’est pas à l’ordre du jour.

Si la rivalité sino-américaine s’est bien cristallisée autour de Taïwan, c’est que l’île, jugée renégate par Pékin, symbolise un entre-deux mondes dans lequel se joue une double course de vitesse : une course à la parité stratégique et militaire en Asie et, en parallèle, une course plus indécise à la suprématie technologique globale. La Chine est certaine d’atteindre la première, mais pas la seconde. Or, elle lui est nécessaire pour s’engager militairement contre les Etats-Unis qui viennent, par la bouche de son commandant en chef, Joe Biden, le 22 octobre, de verrouiller leur destin avec celui de Taïwan.

Stabilisateur involontaire

La recherche chinoise d’une parité militaire en Asie et dans le détroit de Taïwan est le sous-produit de calculs stratégiques marqués par la guerre froide, tandis que la course à la suprématie technologique marque l’entrée dans une nouvelle ère. Dans la logique de celle-ci, seul le gagnant raflera la mise et pourra prétendre détenir et conserver alors un avantage comparatif absolu sur ses concurrents dans tous les domaines, y compris sur le plan militaire.

Depuis 2018 et la montée aux extrêmes sino-américaines, on cherche le nouveau vocable successeur de « guerre froide » et par-delà la nouvelle bonne formule, le paradigme qui caractériserait notre période actuelle. La difficulté à lui trouver un nouveau nom tient à ce que nous n’avons pas cicatrisé toutes ses vieilles fractures (Corée du Nord, Sahara occidental, la « question » palestinienne…) et pas encore réinventé un ordre international qui ne soit pas seulement l’empilement de projets nationaux ou régionaux à sommes nulles. Dans cette période transitoire Taïwan fait office de stabilisateur involontaire.

Malgré ses récentes démonstrations de puissance (nouveaux silos de missiles, vols d’intimidation, nouvelle arme hypersonique, projets spatiaux, cyber-ingérences…), Pékin sait que l’avenir ne se jouera pas sur ce tableau où les forces en présence s’équilibreront pour se neutraliser mutuellement sur le modèle de dissuasion et d’« équilibre de la terreur » (« mutual assured destruction », MAD) des années 1950 et du début des années 1960.

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