Il y aura comme un air de Paris-Roubaix lors du prochain Tour de France. Sur la cinquième étape, les coureurs devront notamment batailler sur 11 secteurs pavés. RMC Sport a pu se rendre aux confins du Valenciennois et du Cambrésis dans les pas de Thierry Gouvenou, le traceur de la Grande Boucle, pour constater la difficulté de ce parcours.
Sous le soleil d’hiver, les pavés, beaux, brillants, couverts d’un fin tapis d’herbe encore verte. La carte postale a un côté enchanteur en cet automne aux si douces lumières. Elle se transformera peut-être en cauchemar pour les prétendants au général à l’été venu, au moment de la cinquième étape du Tour de France.
Le vainqueur du Tour 2022 sera à coup sûr un coureur complet. Car en plus de se farcir le vent et de très probables bordures au Danemark, la très haute et suffocante montagne dans les Alpes ou encore un nombre de kilomètres de contre-la-montre rarement atteint ces dernières années, il devra aussi être capable de sortir en un seul morceau des pavés du Nord de la France.
19,4 km d’enfer répartis sur 11 secteurs
Rien de nouveau jusque-là (le parcours du Tour 2022 a été révélé le 14 octobre), si ce n’est que RMC Sport a pu se rendre aux confins du Valenciennois et du Cambrésis cette semaine dans les pas de Thierry Gouvenou, le traceur toujours très inspiré de la Grande Boucle, pour constater la difficulté du final de la cinquième étape du Tour 2022, précisément celle des pavés. Une sorte de mini Paris-Roubaix, sur lequel « il y aura plus de temps à perdre qu’en montagne », prophétise fièrement l’ancien coureur. « Clairement, ceux qui vont viser le général vont appréhender cette étape là comme un moment-clé du Tour de France. Un coureur mal accompagné par ses équipiers peut facilement perdre deux ou trois minutes donc il y a un vrai enjeu sur cette étape. Je pense que les coureurs vont prendre ça très au sérieux. »
Pareille journée sera sans doute de mémoire de suiveur assez inédite sur la route du Tour. Certes les pavés y ont fait leur grand retour depuis déjà une grosse dizaine d’années après plus de deux décennies d’abstinence, mais les organisateurs avaient été un peu « déçus » de la tournure trop plate des évènements notamment lors de la dernière étape du genre sur le Tour 2018. « Cette année-là, on avait mis beaucoup de secteurs, mais des secteurs plutôt courts. Et ça n’avait pas fait beaucoup d’écarts entre les protagonistes », se souvient Gouvenou.
Alors en 2022, les organisateurs ont tout fait pour que l’étape des pavés soit une sorte de concentré bien indigeste pour le peloton : 19.4 km d’enfer répartis sur 11 secteurs, tout cela dans les 75 dernières bornes: « On a un peu révisé notre copie et on a fait en sorte d’avoir des secteurs assez longs et techniques dans le final. Des secteurs avec des virages, propices à créer des écarts. Quand il y aura des cassures, ce sera très dur de s’organiser pour les équipes derrière donc je pense qu’on aura un parcours plus compliqué en 2022 qu’en 2018. »
La Bible des pavés
Les premières vibrations dans les bras et les jambes des forçats se feront donc sentir à 75 kilomètres de l’arrivée, dans le secteur qui portera le numéro 11. Un secteur de 1400 mètres aux allures de bucolique petit serpentin dans la campagne verdoyante entre la sortie boueuse de Villers-Au-Tertre et une petite chapelle typique du Nord toute en briques rouges à Fressain.
Fait assez amusant, les organisateurs du Tour avaient en octobre présenté ce secteur comme inédit, jusqu’à ce que Thierry Gouvenou ne contacte la mairie de Villers-Au-Tertre la semaine dernière pour organiser sa venue sur place afin de reconnaître les lieux. Surprise, le secteur avait été emprunté lors du Tour 1983 dans une étape entre Valenciennes et Roubaix. « J’ai appelé la secrétaire de la mairie vendredi et c’est comme ça que j’ai appris que le tour de France était passé là. On a pu vérifier ça quand on a ressorti les livres de route. Bon, quand on regarde la carte on a du mal à imaginer que le tour de France est passé là. Ce n’était pas très précis les cartes à cette époque. Maintenant on travaille avec un peu plus de précision. »
Une précision bien nécessaire tant ce petit coin de France regorge de chemins pavés. Ils servent essentiellement aux agriculteurs pour relier les routes à leurs champs, voire les explorations agricoles entre elles. Il y en a des dizaines et des dizaines. Sans doute même des centaines. Personne ne les a vraiment jamais comptés. Mais les organisateurs du Tour en ont répertorié une partie depuis plus de 20 ans dans une sorte de « Bible des pavés » régulièrement ressortie pour Paris Roubaix. « Sur la Bible on a en tout 85 km de secteurs pavés ’empruntables’ pour des courses de vélo, raconte Thierry Gouvenou. Nos courses ont dû en emprunter 70 environ donc il en reste une quinzaine. »
Quelques travaux à réaliser
Dans cette bible notamment, les secteurs d’Emerchicourt à Montchecourt et d’Auberchicourt à Emerchicourt. Totalement inédits, ils seront utilisés pour la première fois par une course cycliste lors du Tour 2022. Thierry Gouvenou les avait sous le coude. Il avait même hésité à y faire passer le peloton de la Grande Boucle en 2018, avant de se raviser. Mais 2022 sera bien leur année, pour le plus grand bonheur de Régis Roussel, le maire d’Emerchicourt. « C’est une fierté pour notre village de 930 habitants. C’est l’occasion aussi de pouvoir profiter de cette événement international avec en plus des passages à différents endroits de la commune. »
D’ici là, il faudra quand même réaliser quelques travaux sur place pour rendre les lieux praticables pour la crème des crème du cyclisme mondial. C’est aussi pour cela que Thierry Gouvenou et ses équipes viennent sur place de très nombreux mois avant le passage de la compétition. « Le secteur d’Emerchicourt à Montchécourt est assez particulier, nous montre-t-il. Il n’y a pas énormément de pavés au départ, après ça s’améliore mais plus loin on s’est rendu compte qu’il y avait des tranchées pour faire passer le gaz donc à un endroit il n’y a plus de pavés. Il nous faudra remédier à ça avec les Amis de Paris Roubaix, et les élèves des lycées horticoles de la région. » En espérant que le Jour-J la course y donne un scénario magnifique.
Plus loin, à quelques centaines de mètres de la fin de l’étape, le dernier secteur emprunté par les coureurs le 6 juillet prochain sera le célébrissime secteur de HAsnon à Wallers, au doux nom de secteur « Pont Gibus », en hommage à Gilbert Duclos-Lassale qui y avait construit sa victoire sur Paris-Roubaix en 1992. Là, ne devrait rester en tête de course que l’élite du pavé, les tous meilleurs du peloton, ceux qui auront eu aussi le plus de chance. Aymeric Robin, président de la communauté d’agglomération du Hainaut imagine déjà les coureurs arriver pleine balle vers la ligne d’arrivée à Wallers. « Ca peut être un très beau spectacle en espérant que la météo ne soit pas aussi capricieuse que ce qu’on a connu sur Paris Roubaix cette année pour ne pas gâcher la journée. Mais la vue d’hélicoptère sur le site devrait nous offrir des images magnifiques. »
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