Sur la piste de l’aéroport militaire de Torrejon de Ardoz, dans la banlieue de Madrid, un père et sa fille s’embrassent, en pleurs, ce 11 octobre au soir. Osman (tous les noms des réfugiés ont été changés à leur demande), un traducteur afghan de 53 ans, qui a travaillé pour des médias étrangers, notamment espagnols, avant d’occuper un poste de directeur d’un programme de la Banque mondiale, a retrouvé sa fille, après deux mois de séparation et la crainte que celle-ci ne soit définitive. Somaia, 19 ans et son mari, Ahmal, 32 ans, font alors partie des quatre-vingt-quatre réfugiés afghans transportés d’Islamabad, au Pakistan, par l’armée espagnole à bord d’un avion militaire A400M, lors d’une opération d’évacuation tardive, unique en Europe. Le lendemain, 12 octobre, 150 autres collaborateurs afghans et leur famille ont suivi. Et l’intention de Madrid est bien de poursuivre, en ayant recours, si besoin est, à d’autres pays de transit.
Après la fin des grandes évacuations du mois d’août, organisées à la hâte par de nombreux pays lors de la prise de pouvoir des talibans, l’Espagne a fait figure d’exception en organisant, en octobre, des convois militaires pour évacuer, de nouveau, des dizaines d’Afghans vers la frontière pakistanaise. Des fonctionnaires du corps diplomatique et des bus les y attendaient pour rejoindre Islamabad, puis, à partir de là, Madrid. Un véritable défi qui visait à honorer la promesse de Madrid de « n’abandonner personne », parmi les Afghans qui ont collaboré, à un moment ou un autre de leur vie, avec l’Espagne.
« Même si les difficultés pratiques sont importantes, notamment car nous n’avons plus de personnel sur le terrain, notre engagement vis-à-vis de nos anciens collaborateurs afghans et de leur famille est ferme, explique au Monde le ministre des affaires étrangères, José Manuel Albares. Nous ne pouvons pas abandonner des gens qui ont collaboré vingt ans avec nous, avec le danger que cela suppose pour leur vie. L’Espagne (…) doit tout faire pour pouvoir continuer à se regarder dans le miroir sans rougir. »
Négociations avec le Qatar et l’Iran
En août, le pont aérien mis en place entre Torrejon et l’aéroport de Kaboul avait déjà permis d’évacuer plus de 2 000 personnes et fait de l’Espagne un « hub » pour le transfert de collaborateurs des services extérieurs de l’Union européenne. Ce qui avait fait dire à la présidente de la Comission, Ursula Von der Layen, que « l’Espagne est un exemple de l’âme de l’Europe ».
Madrid n’a pas voulu en rester là. Dès le 10 septembre, le ministre Albares s’est rendu à Islamabad afin d’« essayer de trouver des voies sûres » pour les opérations d’évacuation. Puis au Qatar. Et encore à New-York, où il a rencontré son homologue iranien. « Ces trois pays m’ont apporté leur soutien et à partir de ce moment-là, nous avons envisagé différentes options, souligne le ministre. Tout ce que les autorités pakistanaises m’avaient assuré a été respecté, aussi bien pour permettre l’atterrissage et le décollage des avions, faciliter le passage de la frontière avec l’Afghanistan grâce à des sauf-conduits, ou garantir la sécurité de nos collaborateurs et leur famille lors de la traversée de l’Afghanistan. »
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