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La Cour suprême se penche sur la loi texane limitant drastiquement l’avortement

Une pancarte sur laquelle est inscrite « Aux Etats-Unis on attaque le corps des femmes », devant la Cour suprême, à Washington, le 1er novembre 2021. MANDEL NGAN / AFP

Signée en mai par le gouverneur républicain Greg Abbott, la loi texane sur l’avortement est entrée en vigueur début septembre. Elle n’est pas seulement répressive, interdisant la procédure au-delà de six semaines de grossesse. Par ses modalités inédites et ses implications vertigineuses, elle était destinée à finir devant la Cour suprême. Lundi 1er novembre, les neuf magistrats se sont penchés sur deux plaintes qui ne portaient pas sur le droit à l’avortement lui-même, mais sur la possibilité de contester en justice la législation texane. Pendant ce temps, au Texas, les cliniques ont drastiquement réduit leurs activités et les femmes enceintes ont souvent recours à des interventions dans des Etats voisins. Les magistrats appellent cela « l’effet glaçant » de la loi.

Au terme de trois heures de débats passionnants, il n’était pas clair lundi si la Cour était prête à revenir sur sa propre position, prise début septembre, et à suspendre l’application de la loi texane. En revanche, une majorité semblait se dessiner, au fil des questions, en faveur de la possibilité laissée aux associations d’attaquer cette législation devant les tribunaux texans. Il ne s’agit que d’un volet dans une longue bataille, aux multiples épisodes. Les mois à venir s’annoncent explosifs, alors que les conservateurs dominent la Cour suprême (six contre trois).

La loi texane interdit l’interruption volontaire de grossesse (IVG) à partir du moment où le battement du cœur de l’embryon peut être détecté, soit environ six semaines. Presque une interdiction générale : entre 85 % à 90 % des avortements concernent une grossesse parvenue au-delà de ce délai. La loi se veut puissamment dissuasive. Elle ne prévoit aucune exception pour le viol ou l’inceste. Surtout, elle délègue la responsabilité de son application aux citoyens. Ces derniers sont appelés à dénoncer devant la justice toute personne ayant contribué à un avortement, de façon directe (médecin, infirmière) ou très indirecte (le chauffeur de taxi ou de bus qui conduirait la patiente à la clinique). Cette délation peut rapporter jusqu’à 10 000 dollars (8 600 euros) pour chaque supposé « complice ». Autre aspect stupéfiant de la législation : ce n’est pas au plaignant d’apporter la preuve du supposé délit, mais au prévenu de s’en défendre. Si ce dernier est déclaré coupable, il devra en plus rembourser les frais de justice du plaignant.

Une loi « extraordinairement dangereuse »

Un juge d’Austin avait imposé la suspension de cette loi, début octobre, en soulignant que « les femmes ont été illégalement empêchées d’exercer un contrôle sur leur vie selon des façons protégées par la constitution ». Mais un autre magistrat, en appel, a renversé cette décision. Plus haute instance de recours, la Cour suprême a refusé de bloquer le 1er septembre l’application de la loi texane. Le lendemain, Joe Biden s’est posé en premier défenseur des droits reproductifs, publiant un communiqué sec sur cette « attaque sans précédent » contre les femmes, « libérant un chaos non constitutionnel ». Evoquant une « erreur » de la Cour suprême, le président annonçait la volonté de l’Etat fédéral de contester la législation texane devant les tribunaux. Le département de la justice a été mobilisé. Lundi, Elizabeth Prelogar, la nouvelle représentante du gouvernement (solicitor general) auprès de la Cour, a estimé que la loi texane était « extraordinairement dangereuse pour [la] structure constitutionnelle » et que le gouvernement « a un intérêt souverain à défendre la suprématie de la loi fédérale ». Mais certains juges conservateurs ont semblé douter de la légitimité d’une telle intervention fédérale.

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