Une panne sèche à l’échelle de tout un pays : depuis plusieurs semaines, Haïti est paralysé par une grave pénurie de carburant, qui complique encore davantage le quotidien d’une population déjà durement éprouvée. Le pays caribéen, en proie à une grave crise politique, économique et sécuritaire depuis le début de l’année, et en particulier depuis l’assassinat du président Jovenel Moïse en juillet, avait également subi, coup sur coup, un puissant séisme qui a fait plusieurs centaines de milliers de sinistrés en août, puis un ouragan.
Ces fléaux se trouvent aggravés par une explosion de la criminalité qui fait vivre les Haïtiens dans la crainte des enlèvements crapuleux commis par des bandes surarmées qui font régner leur loi sur le pays, en toute impunité. Selon le Centre d’analyse et de recherche en droits humains (Cardh), les gangs ont commis plus de 782 enlèvements contre rançon depuis le début de l’année. Seize citoyens américains et un Canadien, enlevés le 16 octobre, sont toujours entre les mains du groupe « 400 Mawozo ».
Les pénuries épisodiques de carburant n’ont rien de nouveau en Haïti. Mais celle-ci se distingue des précédentes par sa longueur et sa gravité. Le pays est à sec, et, à Port-au-Prince, le tumulte habituel a fait place au silence. « En raison de l’insécurité, bien avant ce problème de pénurie d’essence, tout le monde avait tendance à rentrer rapidement chez soi. Vers 17 heures, les rues étaient vides, précise Rosy Auguste Ducéna, responsable de programmes à l’ONG Réseau national de défense des droits humains. Maintenant, avec ce problème de carburant, les rues sont calmes tout au long de la journée. Les très rares personnes qui circulent sont celles qui ont pu s’en procurer à un prix très élevé ou qui ont des réserves. »
Responsabilité de l’Etat
La cause de cette situation dramatique : les gangs, encore. Et, tout particulièrement, un homme, Jimmy Chérizier alias « Barbecue ». Cet ancien agent de la police nationale est désormais à la tête du « G9 Fanmi e Alye », une coalition de bandes armées qui a instauré un véritable blocus des terminaux pétroliers du pays. Les malfrats rançonnent le gouvernement et retiennent la population en otage : « Ils veulent de l’argent. On a entendu parler de la somme faramineuse de 50 millions de dollars américains [43,2 millions d’euros] pour laisser passer les camions-citernes », s’indigne Mme Auguste Ducéna.
La crise du carburant a aussi une dimension politique. Jimmy Chérizier réclame la démission du premier ministre, Ariel Henry, arrivé au pouvoir en juillet après l’assassinat du président Moïse. « Les autorités ont frayé avec les gangs pour asseoir leur pouvoir, mais ils se sont retournés contre elles. Maintenant, c’est tout le pays qui est gangstérisé », dénonce Rosy Auguste Ducéna.
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