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PortraitCatholique revendiquant les valeurs de respect et de dignité, le président américain s’est toujours passionné pour les débats d’idées. Retour sur le parcours d’un homme politique fier de ses origines populaires qui veut faire rimer « histoire avec espoir ».
Le 28 mai 1975, un courrier est adressé à la philosophe Hannah Arendt (1906-1975). L’affaire tient en quelques mots : « Chère madame Arendt, J’ai appris dans un récent article de Tom Wicker l’existence d’une conférence que vous avez prononcée au Boston Bicentennial Forum. Membre de la commission des affaires étrangères du Sénat, je souhaite vivement recevoir un exemplaire de votre papier. Merci. Cordialement, Joe Biden. » Le futur président paraphe ensuite d’une main agile son laconique courrier. On ne sait pas si Hannah Arendt a répondu à celui qui était alors un jeune sénateur, pas plus que l’on ne sait si l’auteur de ce courrier a bien lu cette conférence donnée dans le cadre des festivités organisées pour célébrer les deux cents ans de l’indépendance des Etats-Unis, et dont, Tom Wicker, un journaliste du New York Times, fit l’éloge.
Le jeune sénateur qui tombe sur cet article du quotidien new-yorkais a sans doute le sentiment que cette conférence lui permettra d’affiner une idée qui lui est chère, combattre la corruption des mœurs politiques. Le pays se débat alors avec la guerre du Vietnam et le Watergate, deux sujets que Hannah Arendt aborde dans l’article « Retour du bâton » que l’on retrouve dans Responsabilité et jugement (Payot, 2005). La philosophe y met en garde contre un mal qui risque d’emporter la République : le mensonge diffusé à coup d’images rassurantes, notamment de la guerre.
Paroucrs d’autodidacte
Ce courrier en apparence anecdotique est révélateur de la manière dont Joe Biden aborde le monde des idées. « Il n’y avait pas beaucoup de membres du Congrès qui s’intéressaient à ce qu’avait à dire Hannah Arendt. Biden était attentif à ce genre d’auteurs car il avait conscience de ses carences, il souffrait d’une certaine insécurité, qui l’a poussé à travailler plus dur, à être plus soucieux des autres », explique Evan Osnos, journaliste au New Yorker et auteur d’une biographie remarquée du président (Joe Biden. American Dreamer, non traduit, Bloomsbury, 2020).
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Premier occupant de la Maison Blanche à ne pas avoir fréquenté l’une des universités de la Ivy League (l’élite universitaire américaine) depuis Ronald Reagan, il a étudié à l’université du Delaware (licence d’histoire et de sciences politiques) et à l’université de Syracuse, en Pennsylvanie (master de droit). A la fac, ses notes n’étaient pas extraordinaires. Pour son diplôme de droit, il termine au 76e rang d’une classe de 85 étudiants. Son parcours est dans une large mesure celui d’un autodidacte, dont l’assise intellectuelle s’est construite au fil de sa longue carrière politique. Biden aborde les idées de manière instinctive, il est avant tout un « gut politician », un politicien dont les convictions remontent des tripes. Sa principale référence reste son histoire personnelle, sur laquelle il revient sans cesse dans ses interventions publiques. Personnage peu connu en France, bien qu’il ait consacré la majorité de sa vie à la politique, Biden s’appuie sur une image publique d’homme du peuple, que ses concitoyens croisent à la messe. Cet aspect de sa personnalité occulte une autre facette de son identité, qu’il ne met guère en avant : son intérêt pour la vie de l’esprit.
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