La diplomatie européenne est tiraillée entre impératifs humanitaires et politiques. Faut-il renouer avec les talibans pour venir au secours d’une population afghane en danger, au risque d’adouber un régime fondamentaliste musulman qui refuse de se conformer aux règles internationales en matière de droits humains ? Tel est le dilemme qui oppose vivement, depuis deux semaines, des membres de l’Union européenne (UE), alors que Bruxelles a décidé de renvoyer, à Kaboul, pour la deuxième fois, une délégation en Afghanistan.
Pour la France et le Danemark, cette décision confine à la naïveté et revient à ouvrir la voie à la reconnaissance officielle d’un régime peu enclin au compromis, et que même ses alliés russe, chinois ou pakistanais n’ont pas reconnu.
Selon le haut représentant de l’UE pour la politique étrangère, Josep Borrell, les Etats membres de l’UE ont convenu qu’une « présence minimale » de l’UE à Kaboul était « nécessaire pour soutenir le peuple afghan, et garantir un passage sûr aux Afghans en danger, mais cela ne signifie pas une reconnaissance par les Européens du nouveau régime ». Cette déclaration n’a pas échappé au gouvernement taliban. Lundi 25 octobre, les autorités talibanes ont promis de « garantir la sécurité de cette mission européenne », fermée mi-août, et qui pourrait rouvrir d’ici quatre à cinq semaines. Lundi, le porte-parole taliban du ministère des affaires étrangères, Abdul Qahar Balkhi, évoquait une étape « importante et positive ».
« La famine est préoccupante, dramatique, avec la moitié de la population qui a besoin d’aide », indiquent les proches de M. Borrell, appelant l’UE à être « leader » face à ce drame. Ils ajoutent que, sans solution, « la voie sera ouverte pour la Chine, les Emirats ou la Russie ». Embarrassant pour une Union qui se veut « géopolitique ». Les ministres des affaires étrangères de l’UE avaient, eux, fixé, en septembre, une série de conditions pour la poursuite d’un dialogue prudent, axé sur l’action humanitaire. Mais la répression de manifestations et vis-à-vis de journalistes par les talibans, comme la composition – peu inclusive – du nouveau gouvernement, avait figé l’attitude des Vingt-Sept, n’évoquant plus que la nécessité d’un « engagement opérationnel ».
« Sauver une population en détresse »
Cette formulation très vague du mandat traduisait la volonté d’empêcher « l’implosion » du pays, sans toutefois reconnaître officiellement ses dirigeants. Il s’agissait aussi, pour l’Union, d’éviter une nouvelle vague migratoire qui fait trembler de nombreux pays. Le 12 octobre, des délégués de l’UE ont rencontré des émissaires talibans à Doha, au Qatar. Un échange « technique et informel », soulignaient, prudemment, les intéressés. Bruxelles envoyait, par ailleurs, à Kaboul, à deux reprises, pour préparer la réouverture d’une antenne européenne, une délégation menée par Arnout Pauwels, ex-numéro deux de la mission de l’UE dans la capitale afghane.
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