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Etat de droit : la Pologne frappée au portefeuille par la Cour de justice européenne

La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), à Luxembourg, en janvier 2017. FRANCOIS LENOIR / REUTERS

Entre les institutions européennes et le gouvernement national-conservateur polonais, à la guerre des mots succède désormais le choc des sanctions. A la demande de la Commission européenne, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a décidé d’appliquer, dans un arrêt rendu mercredi 27 octobre, une astreinte d’un million d’euros par jour à l’encontre de Varsovie, tant que le gouvernement ne se sera pas conformé à un arrêt rendu par cette même Cour le 14 juillet.

Celui-ci stipulait que la majorité du PiS (Droit et justice) devait « suspendre immédiatement » le fonctionnement de la chambre disciplinaire de la Cour suprême, un des éléments clés de ses « réformes » controversées de la justice, perçu par les magistrats comme un instrument de contrôle politique. Malgré les multiples annonces de sa suppression, le fonctionnement de cette chambre n’a été que partiellement suspendu. « La mise en place des mesures provisoires décidées le 14 juillet est indispensable pour éviter un sérieux et irréversible dommage à l’ordre juridique européen ainsi qu’aux valeurs sur lesquelles s’appuie l’Union », s’est justifiée la CJUE.

Cet arrêt intervient dans un contexte où les tensions entre Varsovie et Bruxelles se sont profondément accentuées ces dernières semaines, depuis le séisme politique provoqué, le 7 octobre, par l’arrêt du Tribunal constitutionnel polonais, une institution différente de la Cour suprême judiciaire et étroitement contrôlée par le pouvoir, qui a remis en cause la primauté du droit européen sur le droit national. Tentant de justifier cette décision devant le Parlement européen, mardi 19 octobre, le premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki, s’est retrouvé durant près de quatre heures sous le feu de virulentes critiques des eurodéputés et s’est livré à des échanges tendus avec la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.

« Troisième guerre mondiale »

La Pologne a toutefois évité des remontrances ouvertes lors du Conseil européen des 21 et 22 octobre car l’Allemagne, et dans une moindre mesure la France, tenaient à arrondir les angles et privilégier l’option du dialogue. La Commission européenne n’en a pas moins fait comprendre à Varsovie qu’elle bloquait à ce stade les fonds du plan de relance européen post-Covid-19 dus à la Pologne – près de 36 milliards d’euros – tant que ses postulats clés en matière de respect de l’Etat de droit ne seront pas respectés.

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a confronté le premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki (au fond, numéro 23), au Parlement européen, à Strasbourg, le 19 octobre 2021. RONALD WITTER / AP

En réponse, M. Morawiecki a décidé de jouer la surenchère rhétorique. Dans un entretien accordé le lundi 25 octobre au Financial Times, le chef du gouvernement polonais a accusé la Commission européenne de chantage financier et de « poser un pistolet sur la tempe de la Pologne ». « Que se passera-t-il si la Commission européenne déclenche la troisième guerre mondiale ? Si c’est le cas, nous défendrons nos droits avec toutes les armes à notre disposition », a-t-il fustigé, menaçant notamment de brandir un véto sur le prochain paquet climatique européen. « Nous aurons cet argent tôt ou tard, a-t-il ajouté. Plus tard nous l’aurons, plus ce sera la preuve qu’il y a une discrimination de traitement et une approche sous forme de diktats de la part de la Commission européenne. »

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