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Au Liban, une année charnière pour le système éducatif, menacé d’effondrement

Devant une école, à Beyrouth, le 29 septembre 2021. BILAL HUSSEIN / AP

Nour Ezzeddine le dit d’emblée : l’école privée où elle travaille est privilégiée. Mais avant la rentrée, cette conseillère d’éducation du lycée Elite, situé près de Tyr, dans le sud du Liban, a été chargée d’organiser des échanges de livres scolaires, une pratique qui était rarissime dans le pays avant la débâcle financière entamée à l’été 2019. Sans ce troc, renforcé par des dons de manuels par l’ambassade de France, « de nombreuses familles auraient été incapables de se procurer les livres », ajoute Nour. Alors que la dégringolade économique s’accélère, la dépréciation de la livre mine le moral des enseignants, dont le salaire ne vaut presque plus rien, et les épreuves du quotidien subies par les familles affectent la concentration des élèves. « On ne peut pas baisser les bras sur l’éducation, c’est la force principale du Liban », exhorte la conseillère d’éducation, qui n’échappe pourtant pas aux moments de découragement.

L’enseignement a longtemps fait la fierté du pays du Cèdre, dont la population a la réputation d’être la mieux éduquée du monde arabe. La qualité des cours dispensés et l’importance donnée au plurilinguisme ont offert à des générations de Libanais un sésame vers des études poussées ou des emplois bien rémunérés à l’étranger. Toutefois, le système éducatif s’est fragilisé depuis plus d’une décennie, pour des raisons pédagogiques et financières. Le cataclysme actuel accentue ces failles. « Des années de crises, de troubles politiques et sociaux, ainsi que les récents développements au Liban ont fait que le secteur de l’éducation est devenu largement inefficace et inéquitable. Il ne fournit que de faibles niveaux d’apprentissage et de compétences », notait, sévère, la Banque mondiale en juin.

L’année scolaire qui s’est ouverte est jugée charnière, après deux années d’enseignement très perturbées par l’instabilité qui a suivi le soulèvement populaire d’octobre 2019, puis par la pandémie de Covid-19. En 2020, la plupart des élèves n’ont fréquenté l’école en présentiel que durant quelques semaines. Seule une poignée d’écoles haut de gamme ont réussi à échapper au fiasco des cours en ligne, inaccessibles pour une partie de la population.

Subsides de l’étranger

Historiquement, les écoles privées, souvent religieuses, ont toujours eu la part belle. Elles scolarisaient plus de deux tiers des élèves en 2018. La tradition veut que beaucoup d’enfants effectuent la totalité de leur cursus dans une même école, du primaire jusqu’au bac. Mais ces établissements sont aujourd’hui confrontés au départ des enseignants (près de 10 % auraient quitté le secteur privé sous l’effet de la crise) mais aussi aux difficultés des parents, dans l’incapacité de s’acquitter des frais de scolarité et parfois obligés de basculer leur enfant dans le public.

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