Habitué des coups d’éclat, Recep Tayyip Erdogan calme le jeu. Le président turc a renoncé à expulser les dix diplomates menacés en raison de leur soutien au philanthrope emprisonné Osman Kavala. Les ambassadeurs occidentaux en Turquie ont « reculé » et « seront plus prudents à l’avenir », a-t-il déclaré, lundi 25 octobre. « Notre intention n’était pas de susciter une crise », mais de protéger les droits souverains de la Turquie, a affirmé M. Erdogan.
Cette nouvelle algarade intervient après que les dix ambassadeurs visés, tous en poste à Ankara, ont lancé un appel commun à la libération d’Osman Kavala, mécène turc emprisonné depuis quatre ans sans jamais avoir été condamné.
Dans un communiqué publié lundi 18 octobre, le Canada, la France, la Finlande, le Danemark, l’Allemagne, les Pays-Bas, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, la Suède et les Etats-Unis avaient réclamé un « règlement juste et rapide de l’affaire ». Cet appel a fait suite à une décision de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), laquelle a ordonné la libération du mécène, ce qu’Ankara refuse de faire.
« La justice turque ne reçoit d’ordre de personne »
Ce communiqué constituait une « attaque » et une « insulte » contre la justice turque, a affirmé M. Erdogan lors d’une allocution prononcée après la réunion de son gouvernement. « C’était mon devoir de chef de l’Etat que d’apporter la réponse nécessaire », a ajouté le président turc, estimant que « la justice turque ne reçoit d’ordre de personne ».
« Leur nouveau communiqué montre qu’ils ont reculé », a jugé M. Erdogan, après que les dix pays concernés ont affirmé, par communiqués, agir en « conformité avec la convention de Vienne et son article 41 » qui encadre les relations diplomatiques et interdit toute ingérence dans les affaires intérieures d’un pays hôte.
M. Erdogan avait annoncé samedi avoir ordonné l’expulsion « au plus vite » des dix diplomates, sans cependant que cette annonce soit suivie d’une notification officielle aux Etats concernés. Renvoyer les ambassadeurs risquait d’ouvrir la porte à une crise diplomatique sans précédent, doublée d’une crise monétaire.
La monnaie turque ne cesse de se dévaluer (actuellement 9,73 livres pour un dollar, contre 1,86 en 2011), tandis que l’inflation atteint 19,5 %. Nombreux sont les ménages qui ne peuvent plus boucler leurs fins de mois. Enfin, le PIB par tête est tombé à 8 610 dollars (7 380 euros) par personne en 2020, contre 12 489 dollars en 2013. D’où la perte constante de popularité du président et de son Parti de la justice et du développement (AKP) dans les sondages – une première en dix-neuf ans de pouvoir absolu.
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