Même du fond de sa cellule, Alexeï Navalny refuse de se laisser oublier. Par le biais des messages transmis à ses avocats, l’opposant tente d’insuffler un peu de son optimisme à une opposition et à une société civile russes laminées par la répression tous azimuts du Kremlin.
Mercredi 20 octobre, il a reçu dans cette mission quasiment impossible un soutien significatif, avec l’attribution du prix Sakharov du Parlement européen. Son président, l’Italien David Sassoli, a rappelé que M. Navalny, 45 ans, « a combattu sans répit la corruption du régime de Vladimir Poutine ; cela lui a coûté sa liberté et presque sa vie ».
Sa candidature était soutenue par le Parti populaire européen (PPE, droite), principal groupe politique du Parlement européen, et le groupe centriste Renew. De leur côté, les groupes S&D (gauche) et écologistes avaient proposé d’honorer les femmes afghanes se battant pour leur liberté face au régime des talibans.
En une dizaine d’années, l’ancien juriste Navalny est devenu le principal détracteur de Vladimir Poutine et de son « parti des voleurs et des escrocs », formule née durant le mouvement de contestation de 2011-2012. Interdit d’accès aux médias et de participation aux élections, il s’est imposé grâce à ses enquêtes sur la corruption des élites, diffusées sur Internet. S’il a flirté à ses débuts avec l’extrême droite, son programme politique est celui d’un libéral bon teint, centré sur la lutte contre la corruption.
En août 2020, le « blogueur », comme se bornent à le qualifier les représentants du pouvoir, a survécu à un empoisonnement alors qu’il se trouvait en Sibérie. Des laboratoires européens ont identifié la substance utilisée comme étant un agent chimique de la famille du Novitchok. Durant sa convalescence en Allemagne, Alexeï Navalny a participé aux enquêtes rendant le FSB, les services de sécurité russes, responsable de cette tentative d’assassinat.
« Refuser la peur »
Il est ensuite revenu en Russie au début de l’année, sachant qu’il serait arrêté. Un tribunal l’a de fait condamné à deux ans et demi de prison pour violation de son contrôle judiciaire, intervenue précisément durant sa convalescence. C’est l’ensemble du camp Navalny qui a ensuite été ciblé, ses responsables pourchassés et ses différentes structures démantelées.
Mercredi, le Parlement européen a salué « l’immense courage » de ce père de deux enfants qui enjoint à ses partisans de « refuser la peur » et a mené une grève de la faim de vingt-quatre jours, en prison, pour obtenir des soins. Le dernier lauréat russe était, en 2009, l’organisation Memorial, active dans la défense des droits de l’homme et la mémoire des crimes soviétiques. Memorial est aujourd’hui également sous la pression des autorités, de même que l’ensemble des voix critiques ou que les médias indépendants.
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