Tribune. La condamnation, le 30 septembre, de Domenico Lucano, l’ancien maire − de 2004 à 2018 − du village de Riace, en Calabre (Italie), à plus de treize ans de prison ferme, a provoqué, à juste titre, la consternation de toutes les personnes concernées par la question migratoire en Europe. L’accusant d’« association de malfaiteurs visant à aider et encourager l’immigration clandestine, d’escroquerie, de détournement de fonds et d’abus de fonction », la sentence est presque le double des réquisitions du parquet.
Aucune des fautes qu’il a commises n’a pourtant été source d’enrichissement personnel. Elles relèvent exclusivement du droit administratif, comme le fait de ne pas avoir réalisé d’appel d’offres public pour la gestion des déchets de la commune. Domenico Lucano est avant tout visé à cause de la reconnaissance qu’il a acquise depuis plus de vingt ans – comme militant associatif d’abord puis comme maire −, au point d’être aujourd’hui l’une des grandes figures européennes de l’accueil des étrangers. Tout comme l’agriculteur de la vallée de la Roya, Cédric Herrou, la maire de Barcelone, Ada Colau, la chancelière Angela Merkel ou le maire de Palerme, Leoluca Orlando…
Récit vertueux d’hospitalité
Le harcèlement politico-administratif contre « Mimmo » Lucano remonte précisément à l’époque où le village de Riace devient un lieu emblématique dans le débat européen sur l’accueil, ce qui conduira à son arrestation et à son placement en résidence surveillée, en octobre 2018, pour « aide à l’immigration clandestine ». Cela sous l’ère du ministre de l’intérieur et vice-premier ministre italien Matteo Salvini, leader de la Ligue, parti d’extrême droite, aveuglé par la haine contre les migrants et contre les citoyens leur venant en aide au nom de l’universalité des droits humains.
Avec ses 1 800 habitants, le village de Riace a incarné un modèle non seulement d’accueil, mais aussi de développement et de dynamisation de la vie locale à partir de la migration. Ce qu’on a appelé le « modèle Riace » incarne une politique de l’accueil « par le bas ». C’est elle qui a inspiré la stratégie dite d’« accueil diffus » déployée à travers toute l’Italie pendant plusieurs années, avant son arrêt brutal, en 2018, par le même ministre de l’intérieur Matteo Salvini.
Plus largement, ce village incarne une forme d’hospitalité communale qui inclut, encadre et dépasse le geste individuel de l’hébergement citoyen, en lui donnant un cadre collectif, des règles et une prise en charge commune.
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