Malgré les engagements à réduire les émissions de gaz à effet de serre, les plans de production de charbon, de pétrole et de gaz sont toujours largement incompatibles avec les objectifs de l’accord de Paris, selon un rapport publié mercredi.
L’accord sur le climat de 2015 vise à limiter le réchauffement bien en deçà de +2°C par rapport à l’ère pré-industrielle, si possible à +1,5°C. Et un des leviers d’action pour réduire les émissions est la sortie des énergies fossiles, particulièrement polluantes.
Mais les plans de production des gouvernements dans ce secteur sont toujours « en dangereux décalage » avec les objectifs de Paris, a regretté mercredi le Programme des Nations unies pour l’Environnement (PNUE), à deux semaines de la conférence climat COP26.
Pour espérer rester sous +1,5°C, « la production mondiale d’énergies fossiles doit commencer à baisser immédiatement et fortement », souligne le rapport réalisé par le PNUE et plusieurs instituts de recherche.
Mais ce n’est pas le cas.
Les pays « prévoient toujours une augmentation de la production de pétrole et de gaz, et seulement une baisse modeste de la production de charbon d’ici 2040 », a expliqué Ploy Achakulwisut, chercheuse au Stockholm Environment Institute (SEI) et auteure principale du rapport.
La raffinerie de pétrole d’Al-Ahmadi, la plus grande du Koweït, le 13 octobre 2021 (AFP/Archives – -)
Résultat, « les plans de production des gouvernements conduiraient à une augmentation d’environ 240% du charbon, de 57% du pétrole et de 71% du gaz en 2030 par rapport à ce qui serait compatible avec une limitation du réchauffement climatique à 1,5°C », a-t-elle insisté.
Au total, si on considère les énergies fossiles dans leur ensemble, les prévisions de production pour 2030 sont plus de deux fois supérieures (110%) à celle compatible avec une limitation du réchauffement à +1,5°C, et 45 % de plus que ce qui serait compatible avec un réchauffement à +2°C.
– Inchangé –
Selon les experts climat de l’ONU (Giec), pour ne pas dépasser +1,5°C, le monde doit réduire de 45% les émissions de CO2 d’ici 2030, par rapport à 2010, et poursuivre ses efforts pour atteindre la neutralité carbone autour de 2050. Le dernier rapport du Giec en août a mis en garde contre le risque d’atteindre ce seuil de +1,5°C déjà autour de 2030, dix ans plus tôt que prévu.
La centrale thermique au charbon de Suralaya à Cilegon, en Indonésie, le 21 septembre 2021 (AFP/Archives – BAY ISMOYO)
Malgré ces alertes qui montrent que le temps est compté pour agir et éviter le pire des impacts du réchauffement, l’ampleur de l’écart de production d’énergies fossiles est restée « largement inchangée » par rapport aux évaluations des mêmes chercheurs depuis 2019, note le rapport.
Par conséquent, à moins de deux semaines du début de la COP26 de Glasgow, dont un des objectifs est de tout faire pour que l’objectif de +1,5°C reste accessible, l’ONU met une nouvelle fois la pression.
« Lors de la COP26 et au-delà, les gouvernements du monde doivent se mobiliser et prendre des mesures rapides et immédiates pour combler l’écart de production en matière de combustibles fossiles et assurer une transition juste et équitable. L’ambition climatique, c’est cela », a commenté la patronne du PNUE, Inger Anderson.
« Le chemin à parcourir pour parvenir à un avenir énergétique propre est encore long », a regretté de son côté le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres, appelant à transférer tous les financements dédiés aux fossiles vers les énergies renouvelables, pour « promouvoir la décarbonation complète du secteur de l’électricité et l’accès aux énergies renouvelables pour tous.
La raffinerie ExxonMobil Esso de Fawley, dans le sud de l’Angleterre, le 4 octobre 2021 (AFP/Archives – Adrian DENNIS)
Malgré la nécessité de la décarbonation pour atteindre leurs engagements climat, certains pays « accélèrent leurs investissements dans des activités de soutien à la production d’énergies fossiles », a souligné de son côté Michael Lazarus, du SEI.
Selon le rapport, depuis le début de la pandémie de Covid-19 début 2020, les pays du G20 ont affecté environ 300 milliards de dollars de financements vers les énergies fossiles, plus que vers les renouvelables.
Les chercheurs se félicitent en revanche de la baisse « importante » de la finance publique internationale destinée aux énergies fossiles, et de la décision de plusieurs banques multilatérales de développement d’exclure de nouveaux investissements dans ce secteur.
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