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En Afghanistan, les talibans doivent tenir leurs engagements pour être reconnus à l’étranger, prévient Moscou

L’émissaire spécial du président russe pour l’Afghanistan, Zamir Kaboulov, serre la main d’un membre de la délégation talibane, Shahabuddin Delawar, lors des pourparlers sur l’Afghanistan, à Moscou, le 20 octobre 2021. ALEXANDER ZEMLIANICHENKO / AFP

A l’issue des pourparlers internationaux sur l’Afghanistan, organisés à Moscou, mercredi 20 octobre, l’émissaire russe a prévenu les talibans qu’ils devraient tenir leurs engagements en matière de respect des droits humains et de pluralisme politique pour pouvoir compter sur une reconnaissance de la communauté internationale.

« Cela a été dit à la délégation afghane, ce moment n’interviendra que si [les talibans] commencent à se tenir à la majeure partie des attentes de la communauté internationale concernant les droits humains et le caractère inclusif » du régime, a ainsi déclaré l’émissaire spécial du président russe pour l’Afghanistan, Zamir Kaboulov. Les talibans « ont assuré travailler » sur le sujet et ont fait savoir « qu’ils [étaient] en train de travailler sur l’amélioration de la gouvernance, sur l’amélioration des droits humains. Nous verrons bien », a ajouté M. Kaboulov.

Il a annoncé que la dizaine de pays ayant participé aux pourparlers de mercredi – notamment la Chine, l’Iran, le Pakistan et les pays d’Asie centrale – ont appelé l’Organisation des nations unies (ONU) à la tenue d’« une conférence internationale des donateurs » en raison du risque de crise humanitaire. La délégation talibane ne s’est pas exprimée dans l’immédiat après les annonces de M. Kaboulov.

Demande d’une « aide humanitaire, financière et économique »

Au début des discussions à Moscou, le chef de cette délégation, le vice-premier ministre Abdul Salam Hanafi, a cependant jugé que son gouvernement était « déjà inclusif ». « Nous n’avons pas besoin d’aide militaire étrangère, nous avons besoin de soutien pour la paix en Afghanistan, nous avons besoin de reconstruction, de rénovation », a-t-il dit par ailleurs.

Le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a également appelé la communauté internationale à venir en aide aux Afghans. « Nous sommes convaincus que le moment est venu pour la communauté internationale de se mobiliser pour fournir une aide humanitaire, financière et économique, notamment pour empêcher une crise humanitaire et des exodes migratoires », a-t-il souligné.

Abdul Salam Hanafi, un officiel taliban, lors des pourparlers internationaux, à Moscou, le 20 octobre 2021. ALEXANDER ZEMLIANICHENKO / AP

Plus tôt dans la journée, la Russie avait reconnu les efforts des nouveaux dirigeants afghans pour stabiliser « la situation politico-militaire ». Le ministre russe a cependant relevé que « de nombreux groupes terroristes, en premier lieu l’[organisation] Etat islamique et Al-Qaida, cherch[aient] à profiter » de l’instabilité du pays qui se prolonge, malgré la prise du pouvoir par les talibans en août, dans la foulée du retrait américain.

Risque lié à la présence de groupes terroristes

« Il existe un réel risque que les activités terroristes et le trafic de drogue (…) débordent sur le territoire des pays voisins », a-t-il relevé. « La région d’Asie centrale nous inquiète particulièrement », a souligné le diplomate, en référence aux anciennes républiques soviétiques de la région, qui constituent une zone d’influence traditionnelle de la Russie.

M. Lavrov a enfin « regretté » l’absence de délégués américains à Moscou. Cette réunion témoigne de l’intégration accrue des talibans sur la scène diplomatique, après des rencontres au Qatar et en Turquie la semaine dernière. D’ailleurs, le porte-parole taliban, Zabihullah Mujahid, a jugé, mardi, que ces pourparlers renforçaient « la stature » du gouvernement afghan.

Pour la Russie, les pourparlers devaient ancrer sa position de puissance régionale en quête de stabilité à travers l’Asie centrale. Elle souhaite donc que les talibans puissent stabiliser la situation politico-militaire et qu’ils forment donc un gouvernement « inclusif » rassemblant au-delà de leur mouvement afin de juguler ensemble l’action des groupes djihadistes.

Pas encore reconnus comme pouvoir légitime

Depuis leur prise du pouvoir éclair, en août, les talibans sont confrontés à la menace de groupes plus radicaux qu’eux, en particulier aux attentats sanglants de l’organisation Etat islamique au Khorassan (EI-K). Le président russe, Vladimir Poutine, a exprimé la semaine dernière son inquiétude quant à leur capacité à empêcher l’ancrage de telles organisations qui ont « des plans pour étendre leur influence dans les pays d’Asie centrale et des régions russes ».

En outre, lors d’une rencontre avec des diplomates occidentaux au Qatar à la mi-octobre, le ministre des affaires étrangères afghan, Amir Khan Muttaqi, avait prévenu que « l’affaiblissement du gouvernement afghan n’[était] dans l’intérêt de personne », évoquant le risque sécuritaire et celui d’un exode migratoire. Russes, Turcs, Iraniens, Européens, pays d’Asie centrale : tous ont à cœur d’éviter une crise humanitaire. M. Lavrov a notamment relevé, mercredi, que des djihadistes pourraient « se cacher dans des flux migratoires ».

Si les autorités russes parlent aux talibans, mouvement interdit en Russie depuis des années, elles ne comptent toutefois pas dans l’immédiat les reconnaître comme le gouvernement légitime de l’Afghanistan.

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Le Monde avec AFP

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