Les aéroports français ont annoncé, mardi 19 octobre, avoir engagé un recours devant la Commission européenne pour obtenir l’annulation de l’interdiction des liaisons aériennes intérieures lorsque le voyage peut se faire en train sans correspondance en moins de deux heures trente, prévue par la récente loi Climat et résilience française.
« On a déposé cette plainte le 17 septembre », solidairement avec la branche européenne du Conseil international des aéroports (ACI Europe), a déclaré le président de l’Union des aéroports français (UAF), Thomas Juin, confirmant une information du journal La Tribune. Il a estimé que l’article 145 de la loi Climat et résilience, adoptée en juillet en France, était « infondé juridiquement ».
Cet article prévoit l’interdiction des « services réguliers de transport aérien public de passagers concernant toutes les liaisons aériennes à l’intérieur du territoire français dont le trajet est également assuré sur le réseau ferré national sans correspondance et par plusieurs liaisons quotidiennes d’une durée inférieure à deux heures trente ».
M. Juin a rappelé que cet article se fondait sur un texte européen, l’article 20 du règlement n° 1008/2008, prévoyant des exceptions à l’exercice des droits de trafic « en cas d’atteinte grave à l’environnement », mais, selon lui, pour des « raisons locales, temporaires » et ne s’appliquant pas au sujet du réchauffement climatique.
Rassemblement de 165 aéroports
Le règlement européen est formulé ainsi : ces restrictions ont « une durée de validité limitée, ne dépassant pas trois ans, à l’issue de laquelle elles sont réexaminées ».
« On tord le droit européen pour appliquer une mesure qui sera en plus inefficace d’un point de vue environnemental », a affirmé le dirigeant de ce rassemblement de 165 aéroports : les lignes ainsi interdites à partir de mars 2022 représentent « 0,23 % » des émissions des lignes intérieures françaises.
Si le texte prévoit néanmoins des exceptions pour les correspondances, les liaisons entrant dans le périmètre de la loi sont :
Marseille-Lyon
Paris-Orly – Nantes
Orly-Lyon
Orly-Bordeaux
La loi entérine surtout l’existant, puisque le gouvernement avait contraint Air France à renoncer aux liaisons concernées en contrepartie d’un soutien financier en mai 2020. Elle interdit aux concurrents de s’engouffrer dans la brèche.
« Neutralité carbone » d’ici à 2050
Lors des débats parlementaires, l’UAF avait déjà contesté la suppression de ces lignes, en particulier Orly-Bordeaux, sur laquelle, avant la crise sanitaire, plus de 560 000 personnes voyagaient par an.
Les aéroports n’ignorent pas les enjeux du réchauffement climatique, a souligné M. Juin, en rappelant que le secteur s’était engagé à la « neutralité carbone » d’ici à 2050.
Pour les associations regroupées dans le Réseau Action Climat, il en va autrement. « Avec cette plainte contre la suppression des liaisons réalisables en moins de deux heures trente, le secteur aérien confirme qu’il préfère fermer les yeux sur la réalité de son impact climatique : en vingt ans, les émissions du secteur aérien ont plus que doublé », représentant 5 % des émissions de gaz à effet de serre. « Il est urgent de fermer les lignes intérieures pour lesquelles il existe une alternative de train en moins de quatre heures, comme le préconisait la convention citoyenne pour le climat », ce qui pourrait se faire « dès à présent sans contrainte forte pour les usagers ».
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