Avec son crâne lisse, son port élégant et son ton toujours diplomatique, le juge du Supremo Tribunal Federal (STF, « Tribunal suprême fédéral ») Alexandre de Moraes s’est mis à incarner jusque dans les moindres détails l’opposition institutionnelle au populiste président du Brésil, Jair Bolsonaro. Selon ce dernier, le magistrat serait le « mensonge personnifié ». Au sein de la plus haute instance judiciaire du pays, l’homme est surtout rapporteur des principales enquêtes visant directement le chef de l’Etat ou son cercle proche.
A 52 ans, ce catholique marié et père de trois enfants est un pur produit de l’élite de Sao Paulo. C’est dans cet Etat, dans l’une des plus prestigieuses universités du pays, qu’il reçoit son diplôme de droit, en 1990, avant d’endosser l’habit de procureur de justice. En 2002, il devient, à 33 ans, le plus jeune secrétaire à la sécurité publique de l’Etat de Sao Paulo, puis ministre de la justice du Brésil (2016-2017) au sein du gouvernement de Michel Temer.
Menaces de mort
Conservateur, un temps membre du Parti de la social-démocratie brésilienne (PSDB, droite), Alexandre de Moraes s’illustre par une politique de « tolérance zéro ». Comme ministre, il dénonce les supposées « attitudes criminelles » des mouvements de gauche et défend les méthodes ultrabrutales de la police. En 2016, il va jusqu’à se rendre au Paraguay pour détruire, devant les caméras, à coups de machette maladroits des champs de cannabis.
« [Votre] président n’obéira plus à aucune décision prise par M. Alexandre de Moraes ! », tonne Bolsonaro face à ses partisans
La vidéo fait rire, peu importe. Poser en « homme fort » combattant le crime organisé était alors une nécessité. Un an plus tôt, le quotidien Estadao avait en effet révélé que le magistrat avait participé, dans 123 procédures au civil, à la défense de la coopérative Transcooper, suspectée d’être liée au principal groupe de trafiquants de drogue du Brésil, le Premier Commando de la capitale (PCC), dominant l’Etat de Sao Paulo. Des accusations balayées par l’intéressé, mais qui lui colleront longtemps à la peau.
En 2017, le président Temer (un ami, lui aussi pauliste) le nomme au Tribunal suprême fédéral. La décision fait alors polémique : Alexandre de Moraes est jugé par beaucoup trop à droite et trop partisan. Au STF, le magistrat se révélera pourtant habile tacticien, charismatique et plus souple qu’anticipé. « Aujourd’hui, il a abandonné ce côté un peu dur. C’est un homme de centre droit libéral, ouvert sur les questions de mœurs, qui a à cœur de protéger les institutions. Malgré son manque d’ancienneté, il est aujourd’hui l’un des leaders du STF », analyse le chercheur en droit constitutionnel Michael Mohallem.
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