China Fortune Land, RiseSun, Evergrande, Fantasia Holdings : l’énumération des noms des grands groupes immobiliers chinois est un véritable catalogue confucéen, pétri de morale positive, évocateur d’une prospérité que certains avaient imaginée, un peu trop vite, éternelle.
Les déboires financiers que connaît depuis plusieurs semaines Evergrande (« grand à jamais »), le deuxième plus gros promoteur chinois, dont le passif équivaut au produit intérieur brut (PIB) de la Grèce, menacent de provoquer une cascade de défaillances dans le secteur. Une dizaine de groupes sont sous surveillance. Fantasia a d’ores et déjà annoncé qu’il ne serait pas capable d’honorer ses créances. Le séduisant récit patiemment tissé par Xi Jinping depuis la crise du Covid-19, dont la Chine serait sortie plus forte que jamais, est en train de voler en éclats.
Le naufrage d’Evergrande n’a rien d’un « cygne noir », ces événements imprévus susceptibles de provoquer des catastrophes en chaîne en raison précisément d’un manque d’anticipation. Il est au contraire le symptôme d’une situation de surendettement qui dure depuis trop longtemps et à laquelle le gouvernement chinois a décidé de s’attaquer frontalement.
En août 2020, Pékin a ainsi sifflé la fin de la partie en renforçant considérablement les mesures prudentielles imposées aux promoteurs immobiliers pour financer leurs projets. Contrairement à la crise des subprimes de 2008, ce sont donc les autorités politiques qui ont initié le fait générateur de la crise actuelle, rien à voir avec la panique contagieuse qui s’était emparée des investisseurs lors de la chute de la banque Lehman Brothers. Autre différence avec 2008 : les banques chinoises sont sous la coupe du régime, permettant, selon son bon vouloir, de circonscrire l’incendie. Si le scénario d’une crise financière généralisée est peu probable, en revanche, les impacts macroéconomiques s’annoncent gigantesques.
Corde de rappel
L’économie chinoise souffre d’un endettement privé excessif. Il a pour origine les conditions dans lesquelles le gouvernement a orchestré le rattrapage économique du pays ces dernières années. L’immobilier en a été le principal moteur, au point de peser aujourd’hui presque un tiers du PIB. Il représente 74 % du patrimoine des Chinois, contre 61 % en France et 38 % aux Etats-Unis.
Ce poids fait que, jusqu’à récemment, dès que l’économie chinoise menaçait de ralentir, le secteur était systématiquement utilisé comme corde de rappel pour relancer la machine, en incitant le système financier à soutenir les promoteurs dans une course folle au développement urbain. Depuis 2011, Pékin a tenté d’endiguer la spéculation immobilière à quatre reprises. A chaque fois, l’économie a rapidement décroché, obligeant les autorités à réappuyer sur l’accélérateur de l’endettement.
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