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Dans la région de Deraa, le retour chaotique du régime Assad

Sur la route menant au poste frontière de Jaber-Nassib, à 80 km d’Amman, le 4 octobre 2021. NADIA BSEISO POUR « LE MONDE »

Etape par étape, l’armée syrienne étend son contrôle dans le sud du pays, cette région où plusieurs localités rebelles s’étaient vu octroyer, en 2018, une forme d’autonomie parrainée par Moscou, à laquelle elles sont aujourd’hui sommées de renoncer. Des checkpoints de la sécurité militaire sont désormais installés dans le vieux centre de Deraa, berceau du soulèvement contre le régime en 2011. Le drapeau national est hissé dans d’autres bourgades au gré des avancées, au nord-ouest de la ville. « L’extension du contrôle de Damas dans le Sud se fait sans accrocs », affirme un humanitaire qui suit le dossier.

A chaque fois, le processus est identique : accompagnées de la police militaire russe et de dignitaires locaux, les forces du régime pénètrent dans ces lieux. Quelques jours sont consacrés aux taswiyat al-wada’ (« régularisations de statut »), terme qui désigne l’amnistie octroyée aux ex-miliciens rebelles en échange de leur enrôlement dans l’armée régulière. Tournant symbolique, voulu par Damas, la reprise totale de la province de Deraa, à la frontière avec la Jordanie, semble inexorable. « Il n’y a jamais eu de règlement véritable dans le Sud. Ce qui se passe en témoigne », estime Bassam Al-Ahmad, à la tête de l’organisation Syrians for Truth and Justice (STJ, « Syriens pour la vérité et la justice »).

Fin du statut spécial

L’accord de 2018, dicté par Moscou dans la foulée d’une offensive express des troupes pro-gouvernementales, avait créé des poches dotées d’un statut spécial. Les anti-Assad, toujours munis de leurs armes légères, y disposaient d’une relative marge de manœuvre, les forces du régime se déployant uniquement sur les grands axes. Certains insurgés avaient intégré un corps militaire formé par la Russie. Mais l’instabilité et l’insécurité n’ont jamais cessé dans ces zones (arrestations d’ex-rebelles, mitraillage de barrages, kidnappings…), fournissant à Damas le prétexte pour revenir sur l’arrangement de 2018.

L’enjeu n’est pas seulement local. « L’évolution dans le Sud syrien est indissociable des changements régionaux, avance un bon connaisseur du dossier syrien. On assiste à un rapprochement entre Amman et Damas. Pour relancer les relations économiques entre les deux pays ou pour faire transiter du gaz égyptien via la Jordanie et la Syrie vers le Liban [un projet en discussion], il est nécessaire de consolider la présence de l’Etat dans la région de Deraa. »

Le cœur historique de la ville, théâtre des manifestations fondatrices de mars 2011, a été, du fait de cette charge symbolique, le premier nœud que le régime a voulu défaire. L’endroit a été soumis, cet été, à deux mois de siège et de bombardements, afin de retourner les civils contre les combattants et de forcer un « règlement ». Les derniers des insoumis ont accepté début septembre le cessez-le-feu proposé par les Russes. Ceux refusant de remettre leurs armes légères et de « régulariser leur statut » ont été transférés vers Idlib (nord-ouest de la Syrie), l’ultime territoire aux mains de l’opposition.

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