C’est une façon de voir la guerre qui devrait faire réagir. Alors qu’il a pris ses fonctions cet été, le nouveau chef d’état-major des armées (CEMA), le général Thierry Burkhard, a présenté sa « vision stratégique », le 1er octobre, à la haute hiérarchie militaire, et doit poursuivre l’exercice, mercredi 6 octobre, devant les députés de la commission de la défense de l’Assemblée nationale. Une présentation d’ordinaire assez formelle, mais dont le plus haut gradé de l’armée française se sert cette fois pour développer un concept en rupture avec la tradition française des opérations extérieures : « gagner la guerre avant la guerre ».
Alors que la course aux armements ne cesse de s’exacerber partout dans le monde et que les conflits hybrides se multiplient, la formule du nouveau CEMA reflète la volonté d’avancer sur des domaines jusque-là assez marginaux ou peu assumés au sein des armées : notamment l’influence et la lutte informationnelle (lutte informatique d’influence, ou LII). Des champs d’action sur lesquels la Russie, la Turquie ou encore la Chine sont depuis longtemps positionnées, mais où le général Burkhard souhaite désormais engager la France de façon plus décomplexée, tout en défendant son statut de « puissance d’équilibre ».
« Avant, les conflits s’inscrivaient dans un schéma “paix-crise-guerre”. Désormais, c’est plutôt un triptyque “compétition-contestation-affrontement” », a-t-il détaillé auprès de la presse en amont de sa présentation aux parlementaires. « La compétition est devenue l’état normal, que ce soit dans le champ économique, militaire, culturel ou politique et les conflits dits périphériques appartiennent à cette compétition. On a vécu vingt ans durant lesquels la logique était l’engagement sur le terrain, mais aujourd’hui ce n’est plus l’unique solution », a-t-il insisté. Et dans ce nouvel environnement, la guerre des « perceptions », notamment à travers les réseaux sociaux, est devenue centrale, selon lui.
Préparation « à la haute intensité »
Ces propos s’inscrivent dans un virage plus global. Dans les prochains jours, le ministère de la défense doit rendre publique sa doctrine en matière de lutte dans le champ informationnel. Courant octobre, l’agence de vigilance de protection contre les ingérences numériques étrangères (Viginum), rattachée au secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), devrait, elle, officialiser la nomination de son directeur et commencer à fonctionner. En outre, le 29 septembre, a déjà été lancée la commission de réflexion sur l’information à l’ère numérique, présidée par le sociologue Gérald Bronner.
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