L’Union européenne et les Etats-Unis ont vanté mercredi et jeudi à Pittsburgh leur nouvelle coopération dans leurs échanges commerciaux. Mais cet esprit neuf, à défaut d’une réelle concorde, menace de se briser sur l’épineux conflit des droits de douane sur l’acier et l’aluminium qu’ils doivent régler dans les prochaines semaines.
Le sujet, qui empoisonne les relations commerciales transatlantiques depuis plus de trois ans, n’est pas à l’ordre du jour de la réunion du Conseil UE-Etats-Unis sur le Commerce et la Technologie (TTC) qui s’achève jeudi en Pennsylvanie.
Mais il éclipse l’enthousiasme exprimé par les hauts responsables américains et européens sur leur nouvelle collaboration commerciale après les difficiles années Trump.
Les Européens espèrent un geste de l’administration Biden qui, dans le domaine de la politique commerciale, la démarque clairement de Donald Trump.
Avant son départ mardi pour Pittsburgh, le Commissaire européen chargé du Commerce Valdis Dombrovskis avait d’ailleurs estimé que les discussions pour régler ce contentieux étaient « à un stade avancé ».
Mais après une réunion bilatérale avec la secrétaire américaine au Commerce Gina Raimondo et des échanges plus informels, un responsable européen a reconnu que trouver un accord n’allait « pas être facile ».
« Nous n’aurons pas une solution demain », a-t-il prévenu devant la presse en marge de la réunion du TTC à Pittsburgh.
Résoudre ce différend est d’autant plus ardu que le principal point d’achoppement est l’essence même de ce qui a justifié l’imposition de surtaxes par l’administration Trump: la protection de la sécurité nationale américaine.
Invoquant cette nécessité impérieuse, l’ancien président avait infligé en juin 2018 des droits de douane additionnels de 25% sur l’acier et de 10% sur l’aluminium de plusieurs régions du monde, dont l’Union européenne.
Les Européens avaient répliqué en taxant les motos comme les Harley-Davidson, les jeans (dont les Levi’s) ou le whiskey.
– « Gagnant-gagnant » –
« Nous ne nous voyons pas (…) comme une menace pour la sécurité nationale des États-Unis », a souligné le responsable européen. « De notre point de vue le point d’achoppement est comment on supprime complètement » ces surtaxes, a-t-il ajouté. « Mais c’est notre perception ».
Les points de vue divergent d’autant plus que les deux parties sont sous la pression des lobbys industriels.
Interrogé sur la possibilité d’accepter des quotas d’exportations, le responsable a souligné: « tout dépend de ce qui est sur la table ».
« Nous ne signerons pas quelque chose qui reviendrait à nous faire payer pour le reste du monde », a-t-il affirmé. « Ce doit être du gagnant-gagnant ».
Valdis Dombrovskis a précisé mardi que les négociateurs ne disposaient plus que de quelques semaines pour trouver un consensus.
En juin, lors de l’annonce du règlement du conflit sur les subventions à Airbus et Boeing, Washington et Bruxelles s’étaient donnés jusqu’au 1er décembre pour trouver un accord sur l’acier faute de quoi l’UE imposerait une hausse de ses tarifs douaniers.
– Début novembre –
Mais « nous avons besoin de plus ou moins un mois pour les procédures internes » à la Commission afin d’éviter son entrée en vigueur automatique, a expliqué Valdis Dombrovskis, soit « début novembre ».
Cette perspective suscite l’inquiétude de la filière du whiskey américain.
Car sans accord sur l’acier, les droits de douane sur cet alcool doubleront à 50% au 1er décembre. Ce serait un nouveau coup dur aux exportations qui ont chuté de 37% en trois ans vers l’Union européenne.
Dans une lettre adressée cette semaine à la représentante américaine au Commerce Katherine Tai et à Gina Raimondo, 50 fédérations américaines exhortent à trouver un accord sans délai.
Mais du côté américain, rien n’a filtré.
L’échéance de début novembre met la pression sur l’administration Biden.
Mais « les positions sont très éloignées », ont reconnu des responsables européens. « Nous avons néanmoins une compréhension commune que (…) nous devons faire converger nos points de vue ».
C’est cette même approche « constructive » qui prévaut à l’égard de la Chine, autre grand sujet sur le commerce, a souligné mercredi la commissaire chargée de la politique de concurrence, Margrethe Vestager.
Un autre responsable a détaillé la méthode: identifier les distorsions commerciales chinoises et trouver « des méthodes communes » pour les résoudre.
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