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Politique extérieure allemande : le tournant de la doctrine Fischer

« Nous avons besoin d’un nouveau départ en Allemagne, pas seulement en matière de protection du climat, pas seulement dans le domaine de la lutte contre les inégalités, mais aussi en politique étrangère. » Six jours avant les élections législatives, l’interview accordée par Annalena Baerbock (Verts) à Die Welt, le 20 septembre, aura été l’une des rares interventions d’un des trois candidats à la chancellerie centrée sur les enjeux diplomatiques et sécuritaires. A l’approche du scrutin, certains y ont décrypté une offre de service : sachant que ses chances de succéder à Angela Merkel sont minimes mais que l’hypothèse de voir son parti entrer au gouvernement est très sérieuse, la candidate des Verts se positionnerait déjà en future ministre des affaires étrangères d’un chancelier Olaf Scholz (SPD) – casting qu’elle privilégie – ou Armin Laschet (CDU-CSU) – solution à laquelle elle se résignera.

L’Auswärtiges Amt pour les écologistes ? Cela aurait un air de déjà-vu : les années Joschka Fischer (1998-2005), vice-chancelier et ministre des affaires étrangères de Gerhard Schröder (SPD). Des années fondatrices, marquées par la participation de l’Allemagne à l’intervention de l’OTAN au Kosovo, en 1999. Une double rupture en réalité : pour le pays, puisque jamais des soldats allemands n’étaient intervenus sur le sol européen depuis la seconde guerre mondiale ; pour les écologistes, puisque cette conversion fut portée – douloureusement – par le parti, par excellence, du pacifisme et de l’antimilitarisme.

Multilatéralisme

Cette sensibilité « morale » reste présente chez les Verts. Mais elle se manifeste aujourd’hui à travers la défense du multilatéralisme et des valeurs démocratiques face aux régimes autoritaires. Pour le reste, même s’ils restent opposés à l’objectif des 2 % du PIB consacré au budget de la défense fixé par l’OTAN à leurs alliés, Les Verts ont digéré la « doctrine » Fischer, écrivant notamment dans leur programme que « la Bundeswehr doit être équipée, en termes de personnels et de matériels, pour pouvoir dignement remplir ses mandats et ses missions ».

Annalena Baerbock, elle-même, aime se référer aux années Fischer. En juin, elle confiait que le débat de fond suscité au sein du parti par l’intervention au Kosovo (« un débat entre les idéaux et les devoirs : plus jamais la guerre d’un côté, plus jamais de génocide de l’autre ») fut « l’une des raisons » de son engagement. Mi-août, c’est aux côtés de la candidate que l’ancien ministre des affaires étrangères a fait son seul déplacement de campagne. Le lieu n’avait pas été choisi au hasard : le pont qui relie la petite ville allemande de Francfort-sur-l’Oder à sa voisine polonaise Slubice. Là même où, le 30 avril 2004, Joschka Fischer avait retrouvé son homologue Wlodzimierz Cimoszewicz pour fêter l’entrée de la Pologne dans l’UE. Un événement auquel assistait une centaine d’anonymes, parmi lesquels une jeune femme de 23 ans, stagiaire auprès d’une eurodéputée écologiste : Annalena Baerbock.

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