Il y avait un arrière-goût de déjà-vu, vendredi 10 septembre, au Liban, et aussi un certain soulagement d’en finir avec l’affligeant spectacle des marchandages politiques menés en dépit de l’effondrement du pays. Treize mois après la démission du premier ministre Hassan Diab à la suite de l’explosion au port de Beyrouth, le 4 août 2020, et après les deux tentatives avortées de Mustapha Adib et de Saad Hariri de former un gouvernement, le magnat des télécoms Najib Mikati a présenté son cabinet dans le palais de Baabda, entouré du président, Michel Aoun, et du chef du Parlement, Nabih Berri. Le milliardaire sunnite de Tripoli, qui prend pour la troisième fois la tête d’un gouvernement à 65 ans, n’a pas promis de miracles. Il a seulement exhorté la classe politique à travailler main dans la main pour mettre en œuvre un plan de sortie de crise.
« La montagne a accouché d’une souris. On a attendu treize mois pour avoir un gouvernement classique, fade et insipide, qui consacre le partage des postes et des prébendes entre factions politiques. Les oligarques libanais l’ont à nouveau emporté, avec leur technique éculée de jouer le pourrissement », commente Karim Bitar, directeur du département de sciences politiques de l’université Saint-Joseph de Beyrouth. Les mêmes factions qui dominent la vie politique depuis la fin de la guerre en 1990, sous les accusations de corruption, de gabegie et de clientélisme, se sont partagé les 24 portefeuilles ministériels, répartis à parts égales entre musulmans et chrétiens. « On se demande où est passée l’initiative française, qui nous avait promis des figures indépendantes et réformatrices », poursuit M. Bitar.
L’initiative portée par le président Emmanuel Macron en août 2020, et endossée par les partis libanais, de former un « gouvernement de mission » chargé de mener des réformes structurelles en échange du versement de milliards de dollars d’aide par la communauté internationale, a laissé place, au fil des mois, à l’urgence de sortir, coûte que coûte, de la paralysie institutionnelle. Le blocage politique a accentué la crise financière et économique. Aucune alternative aux caciques du régime n’a émergé. Dévissement de la livre libanaise (qui a perdu 90 % de sa valeur), hyperinflation, pénuries de carburants et de médicaments, chômage : le pays s’est effondré à vitesse accélérée et plus de 75 % de la population vit désormais sous le seuil de pauvreté, selon les Nations unies.
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