Les enseignants, comme tout le monde, se souviennent du moment : celui où ils ont appris qu’un premier avion de ligne, puis un second venaient de percuter les tours jumelles de Manhattan, à New York. Pour l’un, c’est la proviseure qui entre, le visage défait, dans la salle des profs. Pour l’autre, ce sont les élèves, au retour du déjeuner, qui annoncent l’événement. Un troisième, tout jeune enseignant, sortait à peine de cours et a allumé la radio dans sa voiture.
La minute de silence du vendredi suivant, elle, est plus floue pour beaucoup. Certains assurent ne pas l’avoir faite en classe, d’autres se souviennent mal de ce qui a été dit. Cet hommage du 14 septembre 2001 est pourtant un moment important, « annonciateur » diront certains, de la suite : pour la première fois, des élèves ont refusé de participer à une commémoration.
« Certains nous ont demandé pourquoi on faisait une minute de silence pour les Américains, et pas pour la faim dans le monde, se souvient François Da Rocha-Carneiro, vice-président de l’Association des professeurs d’histoire-géographie et professeur à Roubaix. Dans mon souvenir, ces élèves-là avaient surtout un sentiment d’injustice, qui est quelque chose de sensible chez les adolescents. »
L’enseignant se rappelle que la salle des profs était elle aussi divisée sur le sujet : certains ont refusé de participer à une commémoration qui leur « tombait dessus » sans explications. Sébastien Ledoux, chercheur en histoire à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne, qui a mené des recherches sur les minutes de silence en milieu scolaire, assure qu’il reste « peu de traces » des débats qui ont eu cours à l’époque. Mais assurément, selon lui, « des enseignants ont refusé d’y participer ».
200 « incidents » après l’attentat contre Charlie Hebdo
Les incidents lors des commémorations qui ont suivi les attentats de 2001 aux Etats-Unis et de 2004 à Madrid seront consignés dans le rapport sur « les signes et manifestations d’appartenance religieuse dans les établissements scolaires » de l’inspecteur général de l’éducation nationale Jean-Pierre Obin, remis en juin 2004 au ministre de l’époque, François Fillon. Le rapport Obin, un temps ignoré par l’institution, est désormais bien connu des acteurs de l’école.
« On m’a même signalé des chants à la gloire de Ben Laden dans un car de ramassage scolaire. Mais à l’époque, personne ne nous a crus », pointera Jean-Pierre Obin, lors d’une audition au Sénat consacrée aux minutes de silence perturbées, en 2015, à la suite des attentats contre Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher de Vincennes (Val-de-Marne), le 7 janvier. Une enseignante auditionnée pour la même enquête raconte que ses élèves ont entonné des chants propalestiniens.
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