Pertes et profits. Il est de bon ton en France de fustiger « l’Etat nounou », qui infantilise ses concitoyens, en leur disant s’ils ont le droit de sortir de chez eux ou en les contraignant à se vacciner. Mais que dire d’un pouvoir qui interdit aux enfants de jouer à la console dans la semaine et leur fixe des horaires pour aller se coucher ? Le mardi 31 août, le gouvernement chinois a décidé que, désormais, les moins de 18 ans ont interdiction de jouer aux jeux vidéo dans la semaine et seront limités à trois heures le week-end. Mieux que le carré blanc de la télévision française des années 1960 !
Il faudrait pourtant se garder de sourire de la mesure, curiosité d’Etat totalitaire, avide de formater les esprits par une censure implacable. Cette décision pourrait marquer un tournant dans une industrie devenue considérable. Le marché mondial des jeux vidéo représente des recettes mondiales de 300 milliards de dollars en 2020 (environ 253 milliards d’euros, chiffres Accenture), soit plus que le cinéma et la musique combinés.
On compterait 2,7 milliards de joueurs sur la planète dont… 720 millions de Chinois. De loin le pays qui compte le plus d’adeptes et qui abrite le plus gros acteur mondial, Tencent, à la fois champion des médias et de la communication avec sa messagerie WeChat, un mélange de Facebook, de Vivendi et d’Ubisoft. Il contrôle deux jeux stars comme PUBG et Honor of Kings, qui ont chacun généré 2,5 milliards de dollars (environ 2,1 milliards d’euros) de recettes en 2020.
Une inquiétude mondiale
« Même pas mal », s’est empressée de clamer l’entreprise en approuvant la décision de Pékin. Après tout, les mineurs ne représentent qu’une minorité des joueurs, près de 15 % du total, dans le pays et encore moins du chiffre d’affaires. Mais les analystes ont vite pointé le risque pour l’entreprise de voir se tarir sa source de nouveaux joueurs. Les trentenaires qui constituent son réservoir le plus profitable ont tous commencé en culotte courte.
Nombre de parents ne parviennent plus à domestiquer l’usage des jeux par leurs enfants dès qu’ils abordent l’adolescence et qu’ils possèdent leur smartphone
Le problème pour l’industrie du jeu vidéo est que cette décision chinoise n’est que l’expression caricaturale d’une inquiétude qui traverse le monde entier sur l’addiction des plus jeunes à des pratiques parfois destructrices de leur temps de sommeil et de leur assiduité scolaire. En 2019, l’Organisation mondiale de la santé a classé le trouble du jeu vidéo (gaming disorder) comme une véritable maladie, avec ses conséquences sur la santé, la scolarisation et la socialisation. Selon les enquêtes, seuls quelques pour-cent des adeptes sont touchés, mais leur nombre a sérieusement augmenté avec la généralisation des jeux en ligne multijoueurs sur téléphone mobile.
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