En déclenchant des élections fédérales anticipées le 15 août dernier, le premier ministre canadien Justin Trudeau tentait un coup de poker : il entendait faire « tapis » en fin de partie, et récupérer une majorité à la Chambre des communes, majorité perdue par le Parti libéral en octobre 2019.
Mais à mi-parcours de cette campagne express de 36 jours, les sondages nationaux indiquent tous que le candidat libéral a perdu sa place de favori au profit du Parti conservateur. Selon les dernières enquêtes d’opinion collectées par le site 338Canada.com le 2 septembre, le leader conservateur, Erin O’Toole, crédité de 34 % des intentions de vote, serait désormais en position de prendre la tête d’un gouvernement minoritaire avec 142 sièges, contre 129 pour le Parti libéral, qui recueillerait 31 % des voix. La majorité absolue est de 170 sièges.
Cette dégringolade s’explique d’abord par le fait que les Canadiens n’ont toujours pas compris pourquoi leur premier ministre avait choisi de les convoquer aux urnes, alors même que la quatrième vague de Covid-19 s’abattait lourdement sur le pays. « Justin Trudeau place ses intérêts personnels au-dessus de l’intérêt général », a asséné le chef du Parti conservateur lors du premier débat entre candidats, qui s’est tenu jeudi 2 septembre, à Montréal. « Le Parlement fonctionnait, il n’y avait aucune urgence à repartir en élection », a renchéri le leader du Bloc québécois (souverainiste) Yves-François Blanchet, qui a ponctuellement servi de force d’appoint au gouvernement minoritaire depuis deux ans.
« Rage populiste »
Justin Trudeau a répété qu’il entendait donner « le choix aux Canadiens » à l’heure où des décisions importantes restaient à prendre pour en finir avec la pandémie, sans forcément convaincre. « Le premier ministre traîne cette incompréhension fondamentale comme un boulet, estime Frédéric Boily, professeur de sciences politiques à l’université de l’Alberta. C’est encore plus vrai au Canada anglais, où la presse anglophone lui a sévèrement reproché son manque de leadership lors de la crise afghane. » La politique étrangère est rarement un facteur décisif de vote, mais l’image d’un premier ministre en campagne au moment où son pays échouait à rapatrier, lors de la prise de Kaboul par les talibans, la totalité des Afghans ayant travaillé avec le Canada, a marqué les esprits.
Si une majorité de Canadiens semblent lui savoir gré d’avoir correctement géré la crise pandémique, du point de vue économique et sanitaire, notamment en plaçant le Canada sur l’une des premières marches du podium mondial en termes de vaccination – 67,9 % de la population doublement vaccinée au 2 septembre – une minorité bruyante d’antivax est venue perturber sa campagne. Le 27 août, des manifestants en colère ont même contraint le candidat à annuler un rassemblement dans la banlieue de Toronto.
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