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Récit« Dernières nouvelles de la chute de Rome » (6/6). La déposition du dernier empereur romain d’Occident, Romulus Augustule, en 476 ne marque pas une rupture brutale pour ses contemporains, témoins du lent effacement de leur civilisation.
Ici nulle trace de désastres, d’incendies ou de désolation. Si l’on observe les choses depuis Rome, l’histoire du Ve siècle est celle d’une série de catastrophes ayant conduit à l’effondrement. Mais vu de Ravenne, dans le nord-est de l’Italie, l’impression est tout autre. Ce qui domine, c’est plutôt le sentiment que le drame s’est déroulé tout doucement, et que l’Empire s’est endormi, comme cette cité qui fut un temps la capitale du monde avant de sortir lentement de l’histoire, presque sans s’en rendre compte.
Pour mieux se représenter l’endroit tel qu’il était en l’an 402, lorsque les empereurs d’Occident décidèrent d’y installer leur cour plutôt qu’à Milan ou à Trèves (en Allemagne actuelle, près de la frontière avec le Luxembourg), trop exposés, il faut faire un petit effort d’imagination. En effet, la ville, située de nos jours à plusieurs kilomètres à l’intérieur des terres, se trouvait alors au centre d’une lagune, traversée de canaux. C’est même la raison pour laquelle il fut décidé d’y établir la cour : en cette époque troublée, choisir pareil environnement était l’assurance d’une relative tranquillité. Car si les Barbares, au fil du temps, avaient acquis un certain savoir-faire en matière de siège, ils restaient encore de piètres marins.
Un pari réussi : Ravenne n’a pas été assiégée ; mais, pour le reste, on ne peut pas dire que les barbares soient restés à distance. Ces derniers surent très bien descendre de cheval et participer aux intrigues confuses qui marquèrent les deux dernières décennies de l’Empire romain d’Occident, jusqu’à la chute finale.
« Esthétiser le crépuscule »
Selon la tradition, la date décisive serait le 4 septembre 476. Ce jour-là, un chef barbare nommé Odoacre enlève ses ornements impériaux à Romulus Augustule, l’enfant de 14 ans qui occupe le trône depuis quelques mois. Emu par sa jeunesse, il l’épargne et l’envoie couler des jours paisibles plus au sud, en Campanie, nanti d’une rente viagère confortable. Ainsi donc, de façon à la fois pathétique et dérisoire, se serait effondré l’empire d’Auguste et de Constantin.
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Si l’on s’en tient aux textes contemporains, ceux-ci évacuent en quelques lignes la déposition de Romulus Augustule. Certains la passent même complètement sous silence. Surprenant pour un événement censé avoir changé la face du monde… Les chroniqueurs ont-ils été myopes au point de ne pas percevoir la portée de ce moment de bascule, à la manière d’un Louis XVI écrivant dans son journal, au soir du 14 juillet 1789, un laconique « rien » ?
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