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Les Afghans de France, une communauté grandissante et divisée

Le restaurant Afghan Best Food, où les clients peuvent manger des plats traditionnels afghans, à Paris, en août 2021. CAMILLE MILLERAND POUR « LE MONDE »

Le drapeau tricolore noir-rouge-vert, celui que les talibans ont décroché partout en Afghanistan, flotte encore au-dessus de l’entrée d’Afghan Best Food, rue de La Chapelle, dans le 18e arrondissement de Paris. Un passant pointe l’étendard du doigt : « C’est plus le bon, faut changer ! » « Moi, c’est ce drapeau-là que je respecte », répond le patron du restaurant, que la plaisanterie n’amuse qu’à moitié. Amanullah Qudratullah a perdu son père en 2014, tué par les talibans. Deux ans plus tard, cet homme de 38 ans au visage doux atterrissait en France avec femme et enfants.

Dans sa ville de Maydan Shahr, au sud-ouest de Kaboul, où sa mère et ses sœurs vivent désormais recluses, Amanullah Qudratullah était concessionnaire automobile. En 2019, il a ouvert ce restaurant, succédant à un fast-food indien, et les Afghans des quatre coins de l’Ile-de-France viennent désormais soigner leur nostalgie en plongeant leur chapli kabab fumant (viande hachée, tomate, oignon, piment) dans une sauce à l’ail.

Deux autres restaurants afghans balisent la rue de la Chapelle, qui n’en comptait aucun il y a cinq ans. C’est que depuis, la population afghane a nettement augmenté, dans le quartier comme dans l’Hexagone.

De 1980 à 2010, la France a accueilli entre 100 et 200 Afghans chaque année, puis entre 400 et 700 jusqu’en 2014. « Ensuite, explique Delphine Rouilleault, directrice générale de l’association France terre d’asile, le début du retrait des troupes d’Afghanistan et la crise syrienne ont entraîné un premier mouvement de migrants vers l’Europe, surtout vers l’Allemagne, la Suède, la Norvège. Et puis, à partir de 2018, on a vu des flux secondaires internes à l’Union européenne, et beaucoup de ces “dublinés”, qui avaient été déboutés dans leur pays d’arrivée, sont venus présenter une deuxième demande d’asile en France. »

Dans la salle du restaurant Afghan Best Food, où les clients peuvent manger des plats traditionnels afghans, à Paris, en août 2021. CAMILLE MILLERAND POUR « LE MONDE »

Viser le regroupement familial

Ainsi les Afghans sont-ils devenus, il y a trois ans, les premiers bénéficiaires du droit d’asile dans le pays : depuis 2018, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) reçoit un peu plus de 10 000 demandes d’asile par an émanant d’exilés afghans. Il en a accordé 5 500 en 2018, 6 244 en 2019, 7 494 en 2020 – près d’un quart du total des étrangers accueillis en France cette année-là (33 204).

Fin 2020, au total, 34 902 Afghans se trouvaient sous la protection de l’Ofpra : 8 109 en tant que réfugiés (fuyant une persécution ou un risque personnels), 26 793 au titre de la protection subsidiaire (contre la violence généralisée dans le pays d’origine). Quelque « 45 000 Afghans ont actuellement un titre de séjour », indique le ministère de l’intérieur, chiffre auquel il faut ajouter tous ceux qui sont en situation irrégulière, par définition impossibles à quantifier.

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