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Le chirurgien Gino Strada est mort

FILE — In this Sept. 4, 2019 file photo, Emergency founder Gino Strada poses for portraits for the film ‘Beyond The Beach’ at the 76th edition of the Venice Film Festival in Venice, Italy. Italian media have reported Friday, Aug. 13, 2021, that Strada, a human rights activist, war surgeon and founder of Emergency non-governmental medical aid organization, has died at 73. (Photo by Joel C Ryan/Invision/AP) JOEL C RYAN / JOEL C RYAN/INVISION/AP

La disparition de Gino Strada, le 13 août, lors de vacances en Normandie, a suscité une profonde émotion dans la péninsule italienne. A 73 ans, l’homme aux faux airs d’un Nanni Moretti à la barbe blanche laisse dans son pays de nombreux orphelins. Médecin de combat, homme abhorrant la guerre, il a doublé sa vie d’humanitaire de celle d’un infatigable combattant pacifiste, salué par tout le spectre politique italien.

Né en 1948 à Sesto San Giovanni, une banlieue ouvrière située aux portes de l’agglomération milanaise, Gino Strada suit des études de médecine à l’université d’Etat de Milan puis s’envole vers les Etats-Unis pour parfaire sa spécialité. Ce sera la médecine de guerre. A la fin des années 1980, il s’engage au Comité international de la Croix-Rouge pour des missions qui le mènent de l’Afghanistan à l’Ethiopie, de la Somalie à la Bosnie.

« Prix Nobel alternatif »

1994 marque le début d’Emergency, qu’il fonde avec son épouse, Teresa Sarti, et quelques compagnons de route. Une première structure est ouverte au Rwanda encore meurtri par le génocide. Puis vient le Cambodge où il passe plusieurs années, et l’Afghanistan où il ouvre en 1998 un premier hôpital de campagne dans la vallée du Panshir, bastion du commandant
Massoud. Aujourd’hui, dans le pays livré aux talibans, Emergency gère trois hôpitaux et plus d’une quarantaine de postes de premiers secours. L’ONG est présente dans une vingtaine de pays de la planète et a sauvé plus de 10 millions de patients, sur tous les théâtres de guerre. Dans ses chroniques de chirurgien de guerre, parues sous le titre « Les Perroquets verts » (Feltrinelli, 1999, Calmann-Levy, 2006), Strada s’arrête sur l’un de ses grands combats : la lutte contre les mines antipersonnelles.

Les « perroquets verts » sont en effet le surnom de ces armes sinistres de fabrication soviétique, dont la gaine de plastique ressemble à des ailes déployées, que les enfants venaient ramasser. « Voir de telles atrocités a changé ma vie » confesse-t-il. C’est à Quetta, au Pakistan, qu’il opère ses premiers enfants estropiés. Malgré la difficulté de ses missions, Strada reste optimiste. « Comme médecin, je pourrais comparer la guerre au cancer : il opprime l’humanité et fait de nombreuses victimes. Cela signifie-t-il que tous les efforts médicaux sont inutiles ? », écrit-il. Son verbe était aussi tranchant que ses scalpels de chirurgien sur les champs de bataille. « C’est donc cela, l’ennemi ? », s’était-il indigné devant les parlementaires suédois en recevant en 2015 le « prix Nobel alternatif », après avoir fait remarquer que 90 % des victimes qu’il soignait étaient des civils, parmi lesquels de nombreux enfants. Sa voix tonnait souvent après un naufrage de migrants en Méditerranée. « Enquêter pour savoir si la Libye est un port sûr, c’est comme enquêter pour se demander si l’eau mouille ! », s’était-il emporté.

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