Le président brésilien d’extrême droite, Jair Bolsonaro, a assisté, mardi 10 août, à un défilé militaire de chars d’assaut et de blindés devant la présidence et le Parlement, à Brasilia, en présence des principaux chefs militaires du pays et de plusieurs de ses ministres. Officiellement, cette cérémonie d’une dizaine de minutes à peine était destinée à la remise au président d’une invitation à un exercice militaire annuel, qui a lieu, depuis 1988, à 80 kilomètres de la capitale.
Symboliquement, c’est un geste politique très calculé, une tentative de démonstration de force, selon les analystes politiques brésiliens : c’était la première fois que l’armée, dont est issu l’ancien capitaine de l’armée Bolsonaro, défilait devant le siège des pouvoirs politiques brésiliens depuis le retour de la démocratie, en 1985.
Le tout dans un climat de crise ouverte entre les institutions judiciaires et le président brésilien, qui s’effondre dans les sondages à mesure que l’élection présidentielle de 2022 se rapproche.
Des critiques récurrentes contre le système de vote électronique
Un manifestant arrêté lors du défilé militaire à Brasilia, le 10 août 2021. EVARISTO SA / AFP
Un juge de la Cour suprême du Brésil a ordonné, le 4 août, l’ouverture d’une enquête contre Jair Bolsonaro pour « diffusion de fausses informations » sur le système électoral. Il a pris cette décision à la suite d’une requête du Tribunal supérieur électoral (TSE), qui avait annoncé ouvrir une enquête contre le chef de l’Etat pour « abus de pouvoir politique et économique (…) dans ses attaques contre le système de vote électronique et la légitimité des élections de 2022 ».
En cause, un Facebook Live de plus de deux heures lors duquel Bolsonaro a assuré qu’il existait des fraudes dans le système d’urnes électroniques en vigueur depuis 1996 au Brésil, sans apporter la moindre preuve. M. Bolsonaro critique, depuis sa mise en place progressive, le vote électronique, avec lequel il a pourtant été élu député à plusieurs reprises, puis chef de l’Etat, en 2018, avec 55 % des voix. Il assure que sans lui il aurait été élu dès le premier tour.
Ce que préconise le président brésilien n’est pas un retour au vote par bulletins en papier, mais l’impression de reçus après chaque vote électronique, pour permettre de recompter les voix « en public » en cas de contestation. La Chambre des députés examine actuellement une proposition de révision constitutionnelle qui modifierait ce système électoral. Mais Jair Bolsonaro sait qu’il ne dispose pas de la majorité des trois cinquièmes des voix nécessaires au Congrès pour le modifier. Il a nié tout lien entre le défilé, organisé par la Marine brésilienne, et ces débats.
Les craintes d’un « scénario à la Trump »
Jair Bolsonaro, flanqué des principaux leaders militaires, lors du défilé militaire à Brasilia, le 10 août 2021. ADRIANO MACHADO / REUTERS
En chute de popularité en raison, notamment, de sa gestion de la pandémie de Covid-19, qui a officiellement coûté la vie à plus de 564 000 personnes, Jair Bolsonaro compte bien se représenter en 2022. Les sondages lui prédisent une large défaite contre à l’ancien président Luiz Inacio Lula da Silva, candidat plus que probable de la gauche après l’annulation de ses condamnations en justice.
En mettant en cause le vote électronique, ainsi que les institutions judiciaires qui le poursuivent, le président du Brésil vise le rapport de force. Il a mobilisé des milliers de partisans ces derniers week-ends dans les rues des grandes villes brésiliennes, tout en agitant la menace d’actions qui auraient lieu « en dehors de la Constitution ».
Au Brésil, on craint désormais un « scénario à la Trump », soit un président populiste et sortant battu, s’accrochant mordicus au pouvoir en mobilisant dans la rue ses partisans. Jair Bolsonaro, qui sait les institutions de Brasilia autrement plus fragiles que celles de Washington, n’a ici rien fait pour rassurer : « Si nous n’avons pas le vote papier en 2022, nous aurons un problème pire encore qu’aux Etats-Unis », prévenait-il dès janvier 2021.
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