Parmi les promesses phares du candidat Emmanuel Macron avant son élection à la présidence de la République, la suppression de l’ISF est intervenue en France en 2018. Si les économistes et analystes politiques sont partagés sur l’impact de cette mesure -certains voient le retour d’exilés fiscaux comme une aubaine pour le futur des recettes fiscales et de l’emploi en France, tandis que d’autres fustigent une baisse immédiate des recettes fiscales et un creusement des inégalités sociales-, celle-ci s’inscrit dans une logique d’harmonisation européenne.
Un ISF qui tend à disparaître en Europe…
Depuis sa naissance en 1992, l’Union européenne (UE) a vu la plupart de ses États membres supprimer ou suspendre l’impôt sur la fortune. Avec l’Autriche et le Danemark en précurseur dès 1994 et 1995, suivis de près par l’Allemagne et l’Irlande en 1997. Depuis les années 2000, les Pays-Bas (en 2001), le Luxembourg et la Finlande (en 2006), puis la Suède (en 2007) ont également dit adieu, ou au revoir, à leur ISF. Les Pays-Bas ont cependant conservé un système de taxation sur le patrimoine des ménages (placements mobiliers et immobiliers). Sur le rendement de ce patrimoine estimé à 4% par le fisc néerlandais, une taxe de 30% s’applique, ce qui équivaut à un impôt de 1,2% sur le patrimoine (hors résidences principale et secondaire qui ne sont pas imposables aux Pays-Bas), c’est toutefois le seul impôt qui pèse sur celui-ci.
En France, l’ISF a été supprimé le 1er janvier 2018. Faisant partie des champions européens de la pression fiscale, le pays a souhaité baisser comme ses voisins le niveau d’imposition sur les revenus du patrimoine. Car si les recettes de celle-ci représentaient 1,8% du PIB français avant le remplacement de l’ISF par l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) selon un rapport de la Cour des comptes datant de janvier 2018, certains analystes estimaient que la croissance française y perdait davantage au niveau économique comme budgétaire, en raison d’une fuite combinée d’entrepreneurs, d’offres de travail et de recettes fiscales.
… remplacé par l’IFI en France
À sa suppression en France, l’ISF a donc été remplacé directement par l’IFI. Comme son nom l’indique, l’impôt sur la fortune immobilière ne concerne plus que le patrimoine immobilier détenu directement (biens immobiliers) ou indirectement (parts dans les sociétés civiles SCI et SCPI, parts dans les organismes de placement collectif en immobilier dits OPCI) par les Français, alors que l’ISF avait pour assiette l’ensemble du patrimoine du foyer fiscal. Désormais, les différents revenus du capital sont soumis à la place à un prélèvement forfaitaire unique (aussi appelé flat tax), de 30%
En 2020, l’IFI a rapporté 1,56 milliard d’euros à l’État, d’après des chiffres annoncés en juillet 2021 dans La Croix par le ministre délégué chargé des Comptes publics Olivier Dussopt. C’est bien moins que les 5 milliards que générait l’ISF avant sa suppression, alors que dans le même temps les revenus des 0,1% les plus riches ont explosé en France. Mais de l’autre côté de la balance fiscale, une dynamique de retour des contribuables les plus riches a été enclenchée d’après un rapport publié en octobre 2020 par France Stratégie, institution publique d’expertise et d’aide à la décision rattachée au Premier ministre.
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Un retour à l’ISF en Espagne, avant l’Europe?
Avec la fin de l’ISF en France, rares sont les pays européens à prélever toujours aujourd’hui un impôt sur la fortune. Au sein de l’UE, seule l’Espagne a fait le choix d’un retour à un ISF semblable à celui qu’a connu la France pendant plus de trente ans. Supprimé en 2018, l’impôt sur la fortune espagnol avait été rétabli en urgence en 2011 dans un pays très durement touché par la crise économique mondiale. Aujourd’hui, il est censé taxer tous les foyers dont le patrimoine excède 700.000 euros (hors résidence principale), mais son taux varie selon les différentes communautés autonomes, et celle de la capitale Madrid a carrément renoncé à collecter cet impôt. Dans la même veine, mais hors UE, la Suisse a conservé un système d’imposition sur la fortune qui change, lui, en fonction de ses cantons. Autrement, seuls la Norvège et le Liechtenstein ont conservé un ISF en Europe.
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Alors que l’impôt sur la fortune n’est plus présent que dans quatre pays européens, il faudra sans doute plusieurs années pour connaître avec précision l’impact économique et fiscal du remplacement de l’ISF par l’IFI en France. Cependant, sa restauration sera vraisemblablement demandée à gauche pendant la prochaine campagne présidentielle, une proposition dans la lignée de l’idée lancée au printemps 2020 par trois économistes français de renom, Camille Landais, Emmanuel Saez et Gabriel Zucman, d’instaurer un ISF à l’échelle de l’UE pour aider à sortir des difficultés financières accentuées par le coronavirus.
(Par la rédaction de l’agence hREF)
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