Publié le : 06/08/2021 – 16:52
Auteur d’un contre magistral dans les tous derniers instants de la demi-finale face à la Slovénie, Nicolas Batum a envoyé l’équipe de France en finale des JO de Tokyo. Souvent critiqué pour son manque de régularité, le basketteur de 32 ans connaît une saison tonitruante. Après avoir été transféré aux Clippers de Los Angeles où il a brillé ces derniers mois, il est enfin décisif chez les Bleus.
Un poster pour l’éternité. En contrant le tir du Slovène Klemen Prepelic à moins de deux secondes de la fin de la demi-finale olympique, et alors que les Tricolores ne menaient que d’un petit point, Nicolas Batum est entré, jeudi 5 août, au Panthéon du sport français.
Héroïque, le capitaine des Bleus, surnommé Batman, a propulsé les Bleus en finale à Tokyo grâce à cette action décisive. Sans ce coup d’éclat, les Slovènes emmenés par leur prodige Luka Doncic auraient sans nul doute décroché leur billet au buzzer. « Je devais faire une action comme ça. Je savais que je n’avais pas réussi un bon match en attaque (3 points à 1/5), mais je devais faire cette action pour mon équipe, pour l’emmener en finale, et c’est ce que j’ai fait », a sobrement réagi Nicolas Batum après cette victoire d’anthologie.
« Quelqu’un de classe »
Déjà auteur de trois contres face à l’Italie, le joueur des Clippers de Los Angeles en a posé quatre contre le Slovénie, autant que la tour de contrôle Rudy Gobert. « Nico a fait ses trucs de Batman à la fin du match », a résumé son coéquipier Evan Fournier. L’entraîneur français Vincent Collet n’a pas manqué lui aussi de saluer ce geste au micro d’Eurosport : « L’action de Nicolas Batum est fantastique et décide qui est le perdant et qui est le vainqueur ».
Fairplay, le joueur s’est aussi fait remarquer au coup de sifflet final en allant réconforter son adversaire Luka Doncic. « Il m’a délivré un chouette message. Nicolas est quelqu’un de classe. Il m’a dit qu’il détestait jouer contre moi, mais dans un sens positif. C’était sympa de sa part », a confié la star slovène en conférence de presse.
Un père parti trop tôt
Adoubé par ses pairs et porté aujourd’hui en triomphe, Nicolas Batum a pourtant connu son lot d’épreuves au cours des années. Le sportif n’a presque pas connu son père, Richard Batum, un sportif camerounais originaire d’Eseka, près de Yaoundé, dans le centre du pays. Cette figure paternelle est partie trop tôt. Basketteur professionnel à Proville dans le Nord-Pas-de-Calais au début des années 90, il meurt d’une crise cardiaque en plein match, alors que Nicolas n’a que deux ans.
Le fils a depuis suivi ses pas sur les parquets. Formé à Pont-l’Évêque, en Normandie, comme l’arrière des Bleues Marine Johannès, il rejoint rapidement le club du Caen Basket Calvados puis le centre de formation du Mans. Les titres se multiplient. Nicolas Batum est sacré champion d’Europe cadets en 2004, champion d’Europe juniors en 2006 avec l’équipe de France, puis champion de France la même année avec Le Mans. Son talent attire l’attention des recruteurs NBA.
En 2008, il s’inscrit à la draft de la NBA, mais lors d’une visite médicale aux Raptors de Toronto, son rêve est sur le point d’être compromis. Le cardiologue de la franchise détecte un problème cardiaque. Une contre-expertise le déclare finalement apte à jouer. Le jeune champion français est sélectionné en 25e position par les Rockets de Houston avant d’être envoyé aux Trail Blazers de Portland.
Des critiques en NBA
Lors de ses premières saisons, il fait les beaux jours du club de l’Oregon, tout en prenant de la carrure en équipe de France. Il participe en 2012 à ses premiers Jeux olympiques et devient champion d’Europe en 2013. Il remportera également deux médailles de bronze aux Mondiaux en 2014 et en 2019. Mais en NBA, sa carrière stagne et les blessures s’enchaînent.
Lors de son passage aux Hornets de Charlotte de 2015 à 2020, on lui reproche de ne pas être assez décisif et de manquer d’agressivité en attaque. Il devient même la bête noire des supporters. « Je n’ai jamais été un gars qui marquait 25 points par match depuis que je suis pro », avait-il rappelé à l’époque au journal The Charlotte Observer. « Quand je jouais en France, les gens disaient : ‘Il n’ira jamais en NBA’ parce que je marquais pas 20 points de moyenne. Mais je tournais à 14 points, 5 rebonds et 6 passes. Je n’ai jamais vraiment accordé d’importance à l’avis des gens sur moi, en dehors du basket ». « Ça ne veut pas dire que je pense être un grand joueur. Je fais beaucoup d’erreurs sur le terrain et j’ai fait de mauvais matchs. Une partie des critiques est justifiée, c’est certain », avait-il ajouté.
Le transfert payant aux Clippers
Nicolas Batum a depuis quitté la Caroline du Nord pour la Californie. Il a intégré l’effectif des Clippers de Los Angeles au début de la dernière saison. Un transfert salvateur. Le Normand a présenté un autre visage. Sous son nouveau maillot, l’ailier a relancé sa carrière, tournant à 8,1 points et 4,7 rebonds de moyenne et devenant l’un des joueurs qui comptent de la franchise, avec une saison terminée aux portes de la finale NBA.
Les Clippers ont atteint pour la première fois de leur histoire la finale de Conférence Ouest, où ils ont été battus par les Phoenix Suns en six matches. « Il joue des deux côtés du terrain, il met des shoots importants », avait ainsi souligné la star de l’équipe Kawhi Leonard dans le LA Times. « Il défend très bien, il fait des passes. C’est une prise importante pour nous ». Selon The Athletic, il devrait d’ailleurs prolonger son contrat avec les Clippers pour deux saisons.
Thx to all the #ClipperNation for the support. Thx to the organization, the fans and my teammates for believing in me. Thank you for welcoming me and my family as one of your own since day one.
Nothing can be taken for granted in life. The journey continues, next stop: Tokyo! pic.twitter.com/Z9CexahJrX
— Nicolas Batum (@nicolas88batum) July 1, 2021
Après cette saison tonitruante, ce basketteur polyvalent a abordé les JO de Tokyo sous les meilleurs auspices. Redevenu à point nommé « Batman », le vengeur masqué qu’on avait perdu de vue depuis quelques années, il sera l’une des clés de la finale, samedi, face aux États-Unis. Pour la troisième fois après 1948 et 2000, les Bleus vont tenter d’enfin monter sur l’Olympe, après deux échecs subis sur la dernière marche, à chaque fois contre les Américains.
Les Bleus possèdent un léger avantage. Ils restent sur deux victoires face à la Dream Team nouvelle génération, en quart de finale du Mondial-2019 (89-79), puis il y a deux semaines en ouverture de la compétition (83-76). « Il ne faut pas qu’on fasse cette erreur qu’on a faite il y a dix ans », a toutefois prévenu Nicolas Batum en référence à l’Euro-2011, lorsque les Bleus s’étaient inclinés dans leur dernier match. Cette année-là, « on bat la Russie, on est heureux et après on fait un non-match contre l’Espagne en finale. »
Batman sait que le défi est de taille en affrontant Kevin Durant et les autres vedettes américaines de la NBA. Mais comme ses coéquipiers, il veut y croire : « Ils vont être prêts, ils mettent pas mal de grosses claques à tout le monde en ce moment. À nous d’être prêts, de se battre, de combattre, et on sait jamais ce qu’il peut se passer sur un match de basket. »
Avec AFP
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