Il y aura peut-être des suites judiciaires dans l’affaire Pegasus en Inde. La Cour suprême, qui examinait, jeudi 5 août, neuf requêtes émanant de journalistes, d’avocats et de députés dont les téléphones ont été espionnés par les agences de sécurité gouvernementales grâce à l’utilisation du logiciel israélien Pegasus, a estimé leurs allégations « graves et sérieuses » et affirmé que « la vérité doit éclater ».
Les requérants demandent l’ouverture d’une enquête indépendante supervisée par un juge en exercice ou à la retraite. Les magistrats ont convoqué une nouvelle audience mardi 10 août en présence, cette fois, d’un représentant du gouvernement.
La mise en place d’une commission d’enquête serait une marque d’indépendance assumée par le nouveau chef de la plus haute juridiction indienne, N. V. Ramana, qui a pris ses fonctions en avril. Il y a quelques semaines, le magistrat avait déjà surpris en demandant au gouvernement de réexaminer la loi sur la sédition, héritage de l’ère coloniale britannique, largement utilisée par les autorités pour emprisonner des citoyens et des opposants sans procès.
Son prédécesseur, Sharad Arvind Bobde, avait, au contraire, suivi pas à pas le gouvernement de Modi sur des décisions-clés, comme la fin de l’autonomie du Cachemire, la construction très controversée d’un temple hindou en lieu et place d’une mosquée à Ayodhya, dans l’Etat d’Uttar Pradesh, ou la réforme de la citoyenneté, stigmatisante pour les musulmans. Le chef de la Cour suprême avait également enterré « l’affaire Rafale » en blanchissant le gouvernement de toute malversation dans l’achat par l’armée indienne, en septembre 2016, de 36 Rafale au groupe français Dassault Aviation, pour un montant de 7,8 milliards d’euros.
L’image de Modi écornée
Sur le plan politique, l’affaire Pegasus a déjà produit un effet inattendu : unir l’opposition jusque-là fort éparpillée. Jamais, depuis la réélection de Narendra Modi, en 2019, elle n’avait parlé d’une seule voix, malgré les coups de boutoir assénés à la démocratie et à la laïcité. Mercredi, 18 dirigeants de parti ont adopté une déclaration commune exigeant un débat au Parlement, en présence du ministre de l’intérieur, Amit Shah, sur cet espionnage massif de la société civile et des opposants politiques. « Nous voulons savoir si le gouvernement a acheté Pegasus et espionné les Indiens », a déclaré Rahul Gandhi. Le leader du Congrès, qui fait partie de la liste des personnalités espionnées, avait réuni quelques jours plus tôt 15 chefs de parti lors d’un petit déjeuner pour discuter d’une stratégie commune.
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