L’écrivain et éditeur italien Roberto Calasso est mort, jeudi 28 juillet, à Milan, à l’âge de 80 ans. Fils d’un universitaire antifasciste, il était né le 30 mai 1941 à Florence. Il est rare de pouvoir associer étroitement ces deux fonctions. La première, lorsqu’elle atteint le niveau de Calasso, relègue généralement la seconde dans les coulisses ou les vestiaires de la littérature. Dans le cas de Roberto Calasso, cette hiérarchie perd son sens.
C’est à l’âge de 20 ans, au début des années 1960, qu’il entra dans l’aventure de la création, puis de la pérennité, des prestigieuses éditions milanaises Adelphi, encouragé en cela par son ami et inspirateur, l’écrivain triestin Roberto Bazlen (1902-1965). Il avait dit explicitement que seule la mort le ferait renoncer à cette activité.
Directeur éditorial à partir de 1971, il devint président de la maison en 1999. Aussi bien sur le versant italien qu’international, les éditions Adelphi ont toujours mené une politique de découverte et maintenu une fidélité à l’égard des auteurs choisis ; il en fut ainsi de Kundera ou d’Anna Maria Ortese, mais aussi de Schopenhauer ou de Joseph Roth. Et les tirages n’avaient souvent rien de confidentiel… On pourrait presque parler d’une élite naturellement ouverte à un vaste public de lecteurs. Evoquant ce « mystère Adelphi » dans Le Monde en 1995, Calasso parla du temps long nécessaire « pour s’adapter à cet imprévu continuel. Même s’il faut aussi avoir des réflexes rapides, l’édition est le métier le plus lent du monde ». A Moscou, en octobre 2001, il intitula sa conférence : « L’édition comme genre littéraire » (reprise dans La Folie qui vient des Nymphes, Flammarion, 2012) ; c’était tout dire.
Elevé à une forte intensité, cet « imprévu continuel », se retrouve dans l’œuvre, intimidante, de Roberto Calasso. Et d’abord, de quoi s’agit-il ? De romans ? D’essais ? De philosophie ? De mythographie ? D’anthropologie ? Sans doute faut-il associer, là aussi, ces catégories, pour pouvoir qualifier au mieux cette œuvre superbement singulière, allant à son rythme, éclairant le lecteur plus que cherchant à l’égarer. Cependant, il jugeait la sociologie de la littérature comme une « triste discipline ». A propos de Ka (1996, traduit en 2000, Gallimard), Salman Rushdie souligne que la réussite du livre tient à l’association du roman et de l’étude savante.
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