L’Australie a obtenu, vendredi 23 juillet, que l’Unesco ne procède pas à l’inscription de la Grande Barrière de corail sur sa liste des sites du Patrimoine mondial en péril, malgré l’inquiétude de la communauté scientifique sur la dégradation de cet écosystème unique.
Deux tiers de la Grande Barrière sont estimés comme ayant souffert d’une manière ou d’une autre. Outre le réchauffement ou les cyclones, elle est menacée par les activités industrielles ou agricoles ou encore par l’acanthaster pourpre, une étoile de mer invasive.
Le Comité du patrimoine mondial a décidé de reporter une telle décision après un lobbying intense de l’Australie. Figurer sur la liste des sites en péril n’est pas considéré comme une sanction par l’Unesco, et certains pays y voient même un moyen de sensibiliser la communauté internationale et de contribuer à la sauvegarde de leur patrimoine.
L’Australie percevait, au contraire, cette éventualité comme une gifle, redoutant que cela n’entame l’attrait touristique de l’ensemble corallien, qui s’étend sur 2 300 kilomètres et génère 4,8 milliards de dollars de revenus par an pour le secteur touristique australien.
Demande d’une nouvelle mission d’évaluation
« J’aimerais remercier sincèrement les éminents délégués pour avoir reconnu l’engagement de l’Australie envers la protection de la Grande Barrière de corail », a déclaré au comité la ministre de l’environnement australienne, Sussan Ley, selon un communiqué.
Actuellement réuni en ligne sous la présidence de Tian Xuejun, vice-ministre de l’éducation chinois et président de la Commission nationale chinoise pour l’Unesco, le comité a estimé que l’Australie devait se voir donner plus de temps pour faire le point sur ses efforts de conservation de la Grande Barrière, inscrite en 1981 au Patrimoine mondial.
Les membres du comité, dont la Chine, la Russie ou l’Arabie saoudite, ont également demandé à l’Unesco d’envoyer une mission d’évaluation sur le site, après les critiques de Canberra reprochant à l’organisation de se reposer sur des rapports existants pour faire ses recommandations.
L’agence des Nations unies avait publié en juin les préconisations de ses experts et organismes consultatifs suggérant que cet écosystème soit rangé sur la liste des sites en péril du fait de sa détérioration, pour beaucoup due à la récurrence des épisodes de blanchissement des coraux, conséquence des bouleversements climatiques.
Un premier sursis obtenu en 2015
Tim Badman, directeur du programme du Patrimoine mondial à l’Union internationale pour la conservation de la nature, a estimé que la Grande Barrière remplissait « sans ambiguïté » les critères pour figurer sur la liste des sites en péril. « Malgré les efforts majeurs effectués par l’Etat partie, le statut de valeur universelle inestimable de la Grande Barrière de corail et les perspectives de rétablissement se sont tous deux détériorés de manière significative », a-t-il dit.
En 2015, l’Australie avait déjà obtenu un sursis au terme d’une campagne de lobbying similaire et en promettant des milliards de dollars d’investissements pour protéger les récifs. Depuis lors, l’ensemble a durement souffert du fait de trois épisodes très graves de blanchissement des coraux.
Le blanchissement est un phénomène de dépérissement qui se traduit par une décoloration. Il est provoqué par la hausse de la température de l’eau – conséquence du réchauffement climatique – qui entraîne l’expulsion des algues symbiotiques qui donnent au corail sa couleur vive. Les scientifiques du gouvernement australien ont affirmé que de nombreux récifs montraient des signes de rétablissement ces derniers temps, tout en reconnaissant que les perspectives d’avenir pour l’ensemble corallien étaient très mauvaises.
Mme Ley s’était rendue à Paris plus tôt en juillet pour faire campagne auprès des pays siégeant au comité. Canberra était allé jusqu’à emmener des ambassadeurs plonger sur la Grande Barrière et 12 des 21 Etats membres du comité avaient proposé de reporter la décision à 2023.
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