La maison de l’horreur. C’est ainsi qu’est connu, depuis deux mois et demi, le numéro 11 de la rue Estevez, à Chalchuapa (80 km à l’ouest de San Salvador). Pendant des années, le propriétaire de cette petite maison aux murs verts, Hugo Ernesto Osorio Chávez, un ancien policier, y aurait attiré des femmes, la plupart jeunes et pauvres, avec des promesses d’un travail ou d’argent, les aurait violées, assassinées et les y aurait enterrées.
La macabre découverte a été faite dans la nuit du 7 mai. Les policiers trouvent alors sept fosses recouvertes d’une chape de ciment dans un patio derrière la maison. A l’intérieur, des cadavres empilés. On ignore toujours le nombre exact de victimes. Elles seraient au moins vingt, peut-être quarante. Les autorités ont assuré que toutes avaient été tuées avant 2019, date de l’arrivée au pouvoir du président Nayib Bukele. Le média en ligne Factum a pourtant montré qu’au moins treize d’entre elles l’ont été en 2020 et 2021. L’article a été censuré par le parquet général.
Le gouvernement accuse les journalistes « malveillants » de vouloir le discréditer dans sa lutte contre la criminalité, alors qu’il affiche une baisse drastique des homicides, et notamment des féminicides. Ceux-ci auraient diminué de 44,2 % en 2020 par rapport à 2019, passant de 217 à 121 femmes assassinées. Ceux de Chalchuapa n’ont pas été comptabilisés dans les statistiques.
En plus de l’ex-policier, neuf autres personnes ont été arrêtées : d’anciens membres de la police et de l’armée, des membres de gangs. On présume qu’Osorio Chávez a utilisé ses fosses pour faire disparaître les corps de victimes d’autres assassins. Alimentant ainsi les soupçons de l’existence de structures qui se débarrassent des cadavres.
Une loi très restrictive sur l’avortement
Selon une enquête du média El Faro, la baisse de la criminalité est due à un accord secret entre le gouvernement et un des principaux gangs du pays pour « pacifier » les rues, en échange d’un meilleur traitement en prison. Mais il n’est pas prouvé que ce pacte inclue la disparition de cadavres pour maquiller les chiffres.
Le massacre de Chalchuapa « montre surtout un système où la vie des femmes n’importe pas, affirme la militante féministe Sara Garcia Gross, et la vulnérabilité totale dans laquelle vivent les femmes dans ce pays ». Une vulnérabilité qui s’illustre notamment à travers la loi très restrictive sur l’avortement : le Salvador est l’un des sept pays, avec le Nicaragua, le Honduras, la République dominicaine, Haïti, le Suriname et Malte, à interdire totalement le recours à une interruption volontaire de grossesse (IVG).
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