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Le vaccin, nouvelle inégalité mondiale entre pays riches et pays pauvres

Dans les années 1970, l’économie mondiale était portée par une matière première vitale, le pétrole. Aujourd’hui elle dépend des vaccins contre le Covid ; qui, comme l’or noir hier, sont produits par une poignée de pays et constituent un bien politiquement sensible et inégalement distribué. La vaccination massive permet aux Etats-Unis de se relancer. Mais les retards dans la distribution des doses laissent une bonne partie du monde à la merci de nouvelles poussées du virus, accompagnées de difficultés économiques.

La croissance du PIB mondial devrait être vigoureuse cette année, avec un taux de 5,6 % selon la Banque mondiale. Mais la reprise se fera à deux vitesses. Pour les pays riches, qui vaccinent beaucoup, tous les espoirs sont permis. A l’inverse, les pays pauvres où la vaccination traîne les pieds verront leur situation se détériorer.

Sombres prévisions

Parmi les grandes économies examinées par la Banque mondiale, les dix pays enregistrant le taux de vaccination le plus élevé devraient connaître une croissance moyenne de 5,5 % cette année. Ceux vaccinant le moins ne progresseront que de 2,5 %. Le fossé s’observe aussi dans les variations des prévisions de croissance. Ainsi, grâce à leur rythme de vaccination, la croissance devrait être de 6,8 % aux Etats-Unis. De l’autre côté de la ligne de partage, le tableau est beaucoup plus sombre. Dans les vingt-neuf économies les plus pauvres de la planète (dont vingt-trois pays d’Afrique subsaharienne), seulement 0,3 % de la population a reçu une dose de vaccin. Leur PIB combiné ne devrait croître que de 2,9 % cette année (au lieu des 3,4 % annoncés il y a six mois). Ce sera leur deuxième plus mauvaise performance en deux décennies. La pire ayant été celle de l’année dernière.

Certes une reprise inégale vaut mieux que pas de reprise du tout. Mais la rapidité de la sortie de crise dans certains pays pourrait causer des problèmes dans d’autres régions du monde. Le boom américain, par exemple, a entraîné en mai dernier une hausse de 5 % des prix à la consommation par rapport à la même période en 2020. Or même une inflation temporaire pourrait déstabiliser les marchés financiers en faisant douter les investisseurs de la volonté de la Réserve fédérale (Fed) de poursuivre sa politique monétaire accommodante. De quoi entraîner une hausse de la prime de risque que les pays émergents doivent acquitter sur leurs emprunts. Notamment ceux qui détiennent de grandes quantités de dette en devises étrangères.

Menace sur les taux

Les autorités de ces Etats redoutent ainsi une répétition du « taper tan-trum » (crainte de la fin de la politique monétaire accommodante) de 2013, lorsque l’annonce par la Fed d’une éventuelle réduction de ses achats d’actifs avait provoqué une hausse brutale des taux et une braderie d’actifs sur les marchés émergents. Pour le moment, l’inflation mondiale reste loin du niveau des années 1970. Mais tout comme la crise pétrolière avait alors placé les responsables politiques devant d’inconfortables dilemmes, les obligeant à relever les taux d’intérêt, la pénurie actuelle de vaccins pourrait les mettre face à des choix cornéliens. Le prix d’une vaccination inégale pourrait être une austérité et un resserrement monétaire prématuré.

© The Economist – London 2021

 

Une vaccination élevée induit une forte hausse du PIB, notamment en Chine et aux Etats-Unis. L’Afrique du Sud et le Brésil, en retard, pourraient payer cher les tensions sur les prix et les taux.

 

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