Fixer un taux minimum mondial d’imposition de 15% sur les bénéfices des multinationales rapporterait près de 6 milliards d’euros par an à la France, selon une évaluation publiée mardi par le Conseil d’analyse économique (CAE).
Cette note du CAE, organisme chargé de conseiller le gouvernement, est publiée moins de deux semaines avant la prochaine réunion des ministres des Finances du G20, où un accord est espéré sur une nouvelle taxation des multinationales.
Début juin, sous l’impulsion américaine, les pays du G7 se sont notamment engagés sur l’objectif d’un taux d’impôt minimum sur les sociétés d’ »au moins 15% ». Selon le CAE, le principe d’un taux minimum effectif d’impôt est un outil « très puissant » qui « pourrait remettre en cause l’existence même des paradis fiscaux », utilisés par les entreprises pour réduire leurs impôts.
Il permettrait à la France de taxer les profits étrangers des multinationales françaises qui auraient été imposées à l’étranger à un taux inférieur au taux minimum, afin de compenser cet écart. Au total, avec un taux de 15%, cela rapporterait à court terme 5,9 milliards d’euros de recettes fiscales par an à la France, estime le CAE.
A titre de comparaison, l’Allemagne y gagnerait 8,3 milliards d’euros, et les Etats-Unis près de 15 milliards d’euros. Pour la France, les deux tiers de ces gains proviendraient des recettes supplémentaires engrangées sur les filiales de multinationales françaises dans des « paradis fiscaux », principalement la Suisse, les Pays-Bas et le Luxembourg.
Le reste proviendrait du surplus de recettes qui seraient perçues en France, certaines entreprises ayant moins intérêt à transférer leurs bénéfices dans les paradis fiscaux.
« L’optimisation fiscale, les montages fiscaux, sont coûteux pour les entreprises », donc pour être intéressants « il faut que les écarts de taux (entre la France et les paradis fiscaux) soient élevés », ce qui ne serait plus le cas, a souligné Mathieu Parenti, un des co-auteurs de la note, lors d’une visioconférence de presse.
Les pertes de recettes liées à des délocalisations d’entreprises ne seraient que de 56 millions d’euros, ajoute le CAE.
En résumé, « pour la France, le gros du gain vient du fait qu’on va taxer davantage des multinationales françaises », a souligné Philippe Martin, président délégué du CAE. A long terme, le surplus de recettes fiscales serait toutefois moins important, dans la mesure où les paradis fiscaux auraient intérêt à s’ajuster à la réforme en remontant leurs taux d’imposition. Le gain atteindrait alors près de 2 milliards d’euros.
Ces évaluations sont toutefois dépendantes de plusieurs paramètres encore en négociation, comme le périmètre des profits taxés, certains pays demandant des exemptions, et le niveau du taux minimum.
En revanche, selon les calculs du CAE, l’autre volet de la réforme en cours de négociation, qui vise à définir une nouvelle répartition des droits à imposer entre pays pour tenir compte de l’essor des géants du numérique, ne rapporterait que 900 millions d’euros à la France.
Selon la proposition américaine, elle viserait les 100 plus importantes multinationales, dont 5 françaises, calcule le CAE.
(Avec AFP)
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