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Au Brésil, le président Bolsonaro éclaboussé par un scandale de vaccins surfacturés

Le président Jair Bolsonaro porte un masque à la main lors d’une cérémonie à Brasilia, au Brésil, le 10 juin 2021. ADRIANO MACHADO / REUTERS

Un scandale financier vient entâcher le mandat de Jair Bolsonaro. Trois sénateurs brésiliens ont demandé, lundi 28 juin, à la Cour suprême l’ouverture d’une enquête contre le chef d’Etat, accusé d’avoir fermé les yeux sur des soupçons d’irrégularités dans l’achat de vaccins anti-Covid. Cette procédure pourrait entraîner sa destitution, même si ce scénario est jugé peu probable par les analystes.

« J’ai déposé une demande d’ouverture d’enquête à la Cour suprême à cause de la grave dénonciation selon laquelle le président de la République n’a pris aucune mesure après avoir été prévenu d’un gigantesque réseau de corruption au sein du ministère de la santé », a déclaré dans une vidéo Randolfe Rodrigues, le vice-président d’une commission d’enquête du Sénat (CPI) sur les « omissions » du gouvernement Bolsonaro durant la pandémie. « La prévarication est un délit prévu par le code pénal. »

L’opposition a de surcroît appelé à des manifestations mercredi et samedi pour demander la destitution du chef de l’Etat.

Plusieurs irrégularités

Cette demande repose sur le témoignage, vendredi, d’un fonctionnaire du ministère de la santé et de son frère député qui ont fait l’effet d’une bombe lors d’une audience devant cette commission. Ce fonctionnaire, Luis Ricardo Miranda, responsable des importations médicales au ministère, a vu atterrir le 18 mars sur son bureau une facture suspecte de 45 millions de dollars pour trois millions de doses du vaccin Covaxin du laboratoire indien Bharat Biotech.

Des signaux intrigants alertent alors M. Miranda qui refuse d’autoriser le paiement. Aucun vaccin n’avait été livré et le Covaxin n’avait pas reçu l’homologation des autorités sanitaires.

De plus, le contrat, d’un montant total de 300 millions de dollars, ne mentionnait nulle part Madison Biotech, la firme singapourienne qui avait envoyé la facture et semblait être une société-écran. Une transaction d’autant plus étonnante que le président avait par le passé rejeté des offres de vaccins moins chers et plus efficaces.

Selon le journal O Estado de S.Paulo, Bharat Biotech avait initialement proposé le vaccin à 1,34 dollar par dose. Mais le Brésil a accepté de payer 15 dollars, soit plus que pour tout autre vaccin qu’il n’ait jamais acheté.

Une affaire jamais transmise à la police fédérale

M. Miranda raconte alors avoir reçu des appels de ses supérieurs exerçant sur lui ce qu’il a qualifié de pression « atypique et excessive » pour approuver la transaction.

D’autres irrégularités dans l’accord entre le Brésil et Covaxin faisant surface, le gouvernement a fini par annuler le contrat. M. Miranda avait immédiatement fait part de ses inquiétudes à son frère, le député Luis Miranda, un partisan de Jair Bolsonaro. Ils auraient alors rencontré le président le 20 mars à Brasilia.

Selon les déclarations des frères devant la CPI, le président leur a assuré qu’il transmettrait l’affaire à la police fédérale. Ce qu’il n’a apparemment jamais fait et a amené les sénateurs à demander lundi l’ouverture d’une enquête.

Selon le député Luis Miranda, lors de cette rencontre, M. Bolsonaro a exprimé son inquiétude quant à l’impact politique de l’affaire et a fait part de ses soupçons sur un potentiel responsable, Ricardo Barros, ancien ministre de la santé.

La promesse d’éradiquer la corruption

M. Barros a nié toute malversation, tout comme le président Bolsonaro, arguant que le contrat a finalement été annulé et accusant les frères Miranda de mener une campagne de dénigrement à son encontre.

« C’est la première grosse bombe » révélée après deux mois d’enquête de la CPI, a estimé auprès de l’Agence France-Presse (AFP) Geraldo Monteiro, politologue à l’Université de Rio.

Le problème le plus immédiat pour le président, dont la popularité est en forte baisse, est le cas Barros. S’il le protège, M. Bolsonaro ruinera son programme anti-corruption qui lui a permis de remporter la présidence en 2018. S’il l’abandonne, il risque de rompre son alliance avec le « Centrao », groupe hétérogène de partis conservateurs qui lui a notamment permis d’empêcher la progression parlementaire de plus de 100 pétitions de destitution contre lui.

Le Monde avec AFP

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