Le festival Joe Biden de la mi-juin en Europe a marqué une innovation géopolitique des plus exotiques : la Chine, puissance du Pacifique, a été officiellement rangée dans les « défis » pesant sur la sécurité de la zone atlantique. C’est nouveau dans l’histoire de l’Alliance militaro-politique nouée entre les Etats-Unis et les Européens en 1949. Ce bouleversement, majeur, amène une question : quelle est la marge d’« autonomie stratégique » laissée aux Européens face à la Chine ?
Le 46e président américain a réussi sa tournée européenne. Il voulait ranger les alliés d’outre-Atlantique derrière les Etats-Unis dans une posture d’opposition au comportement de la Chine sur la scène internationale. A sa façon, calme, directe, Biden a imposé le thème du « défi chinois » à ses alliés du G7 (les vieux pays riches), à ceux de l’OTAN et dans les relations institutionnelles entre Bruxelles et Washington.
En principe, l’OTAN a pour mission d’assurer la sécurité collective des alliés dans la région transatlantique – essentiellement en Europe, là où la menace soviétique était la plus directe. Depuis la fin de la guerre froide, l’OTAN a élargi le champ de ses missions – face au terrorisme islamiste notamment. Dans l’interminable communiqué (79 paragraphes) du sommet du 14 juin, la Chine figure pour la première fois au rang des sujets de préoccupation de l‘organisation. Paragraphe 55 : « Les ambitions déclarées de la Chine (…) présentent des défis systémiques » pour les trente membres de l’OTAN.
Intimidation musclée
La Chine accroît la puissance de son arsenal nucléaire, détaille le communiqué. Elle modernise ses armements dans « l’opacité ». Elle pratique la désinformation numérique. Elle coopère avec la Russie dans des exercices dans la zone euro-atlantique. Pour les alliés occidentaux, ce n’est pas l’OTAN qui va à la Chine ; c’est elle qui vient les « défier ».
Dans le Pacifique occidental, en mer de Chine du Sud notamment, la Chine s’impose par la force. Elle viole le droit de la mer, s’empare d’îlots disputés avec ses voisins et les militarise. Pékin règne par l’intimidation musclée, comme le racontent les chercheurs de l’Institut français des relations internationales dans le dernier numéro de la revue Politique étrangère (été 2021).
Puissance maritime, attachée à la liberté de circulation dans la région indo-pacifique, la France se heurte à une Chine désireuse d’étendre sa souveraineté par les armes. « Nos bateaux sont systématiquement suivis, parfois contraints de manœuvrer face à des navires chinois pour éviter une collision, au mépris des règles de la liberté de navigation », confie dans Le Monde du 11 juin l’amiral Pierre Vandier. Le chef d’état-major de la marine française ajoute : « Nous affrontons une logique d’étouffement » au service de l’expansionnisme pékinois dans le Pacifique.
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