La Chambre des députés brésilienne a adopté lundi 21 juin un projet de privatisation d’Eletrobras, première compagnie d’électricité d’Amérique latine, un volet important du programme de désengagement de l’Etat du président Jair Bolsonaro. Les députés, réunis en séance extraordinaire, ont adopté le texte à une large majorité, 258 voix pour et 136 contre. Il avait déjà été approuvé jeudi par le Sénat.
La privatisation d’Eletrobras doit se faire par le biais de l’émission de nouvelles actions afin de faire baisser la participation de l’Etat au capital de l’entreprise de 51,8 % à 45 %. Même si l’Etat perdra le contrôle du groupe créé en 1962, l’une des quatre plus grandes entreprises étatiques du Brésil, il conservera une « golden share » pour les questions stratégiques.
Les députés avaient déjà approuvé le mois dernier le projet, mais devaient se prononcer à nouveau après que le Sénat y a apporté des modifications, comme une hausse de la part de la production énergétique devant provenir de centrales thermiques. Ils doivent encore voter sur un certain nombre d’amendements avant d’envoyer le texte au chef de l’Etat pour promulgation.
L’opposition s’inquiète d’une hausse des prix
Le gouvernement espère réaliser cette privatisation début 2022 et engranger 60 milliards de réais (9,98 milliards d’euros). Mais avant cela, le barrage d’Itaipu et les centrales nucléaires d’Eletronuclear, qui doivent être gérés par l’Etat selon la Constitution, auront été détachés du groupe Eletrobras. Le processus de privatisation a été enclenché par une ordonnance du 23 février qui avait une validité de seulement quatre mois.
Avant le vote, Jair Bolsonaro avait mis en garde : « sans [cette] privatisation, le système énergétique au Brésil se retrouvera en plein chaos ».
Les investisseurs s’attendaient à voir approuvée la privatisation du groupe qui fournit quasiment un tiers de l’électricité de la première puissance économique d’Amérique latine. Les actions Eletrobras ont progressé vendredi en cours de séance de 10 % après l’approbation du Sénat, et de plus de 35 % depuis le début de l’année dans la perspective de la privatisation.
L’opposition s’inquiète toutefois de voir la perte du contrôle de l’Etat se traduire par une hausse des prix de l’électricité et représenter « une menace à la souveraineté nationale ». Mais le ministre ultralibéral de l’économie, Paulo Guedes, a assuré que l’opération permettrait de réduire de jusqu’à 7,4 % la facture d’électricité des foyers et entreprises.
Pénuries d’électricité
Ces débats interviennent à un moment où le Brésil est aux prises avec une grave sécheresse et des pénuries d’électricité.
L’énergie électrique est produite dans le pays à 85 % par des centrales hydroélectriques. Eletrobras en possède une cinquantaine. Le groupe a produit en 2019 quelque 185 millions de MWh. Même si l’entreprise a été bénéficiaire ces dernières années, elle manque de réserves financières pour rester compétitive.
« La capitalisation est fondamentale pour que l’entreprise récupère une capacité à investir », a déclaré la semaine dernière son président, Rodrigo Limp.
Pour Adriano Pires, directeur du Centre brésilien d’Infrastructure (CBIE), la privatisation va permettre à Eletrobras d’obtenir des ressources pour « revitaliser les bassins hydrographiques » et faire face au changement climatique. « Il devient de plus en plus clair que l’eau va devenir l’une des ressources les plus onéreuses de la planète Terre », a-t-il dit à l’Agence France-Presse.
En dépit du retard pris en raison de la crise du coronavirus, le gouvernement de Jair Bolsonaro espère mener à bien une centaine de privatisations, pour un montant de 445,6 milliards de reais (environ 74 milliards d’euros) qui renflouera des coffres bien vides. Brasilia a récemment réalisé de fructueuses enchères de concessions d’une vingtaine d’aéroports, de terminaux portuaires et de la compagnie des eaux de Rio de Janeiro.
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