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La crainte allemande d’un retour de l’inflation fragilise les avancées européennes

Analyse. Depuis quelques jours, en Allemagne, elles habillent de nouveau les kiosques, ces « unes » qu’on croyait appartenir au monde d’avant. « L’inflation mange notre épargne », « Les Allemands craignent de devoir travailler pendant leur retraite », « 4 % d’augmentation d’ici à fin 2021, annonce la Bundesbank », titre le quotidien Bild, en lettres énormes, édition après édition. Dans les pages, cette fois-ci, pas de Grecs inconséquents ni de Mario Draghi en comte Dracula [le président de la Banque centrale européenne d’alors était caricaturé ainsi dans l’édition du 13 septembre 2019]. Le coupable, insaisissable, est le Covid-19.

La plupart des économistes allemands, tout comme la Banque centrale européenne, s’accordent à penser que la hausse des prix actuellement constatée en Allemagne − 2,5 % au mois de mai, son plus haut niveau depuis dix ans − ne sera que temporaire. Elle serait liée à un rattrapage de la consommation longtemps contenue, à une demande forte sur le pétrole, les matières premières et les puces électroniques qui ne durera pas. Mais le retour d’une inflation qu’on croyait oubliée est une occasion trop belle, pour les tenants de l’orthodoxie budgétaire, de redonner de la voix.

Quintessence de la vertu politique

Wolfgang Schäuble est sans doute le plus célèbre d’entre eux. Le vétéran de la politique allemande, qui fêtera ses 79 ans en septembre, n’occupe plus, depuis 2017, le siège de ministre des finances, comme au temps de la crise de l’euro. Mais il reste, aux yeux de nombreux conservateurs allemands, le « chancelier bis » de l’ère Merkel, le symbole d’une gestion des finances publiques où le « zéro noir » (schwarze Null), le strict équilibre budgétaire, est la quintessence de la vertu politique. La tribune qu’il a fait paraître dans le Financial Times, jeudi 3 juin, a rappelé les épisodes les plus conflictuels de la crise de l’euro. « La paix sociale européenne requiert un retour à la discipline fiscale », y assène-t-il, prônant un « plan de réduction des dettes » en Europe.

De façon significative, Wolfgang Schäuble appuie son propos sur John Maynard Keynes, l’économiste britannique qui prônait la stabilisation des économies en crise par une hausse de la dépense publique. Même en Allemagne, les politiques d’inspiration keynésienne se sont largement imposés avec la pandémie. En quelques mois, Berlin a levé son « frein à l’endettement », a déployé un gigantesque effort pour soutenir son économie, complété par un plan de relance historique en Allemagne, et a appuyé, pour la première fois, un endettement en commun au niveau européen. Comme l’Allemagne, la plupart des pays ont poussé leur endettement pour soutenir leur économie.

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