Le poste est né de l’imagination fertile de Bercy, associé pour cette fois au ministère de la Justice : Conseiller national à la sortie de crise. Son titulaire, Gérard Pfauwadel, sait déjà où il met les pieds : « Entre les tribunaux de commerce, la médiation des entreprises, les experts-comptables, et d’innombrables intervenants encore : oui, c’est la jungle pour le chef d’entreprise qui rencontre des difficultés et ne sait à qui s’adresser », lance ce double diplômé de l’X et de l’Ena. « Le rôle du comité national à la sortie de crise consistera à planter des panneaux indicateurs dans cette jungle, afin de permettre aux responsables, dans les entreprises, de se diriger vers le bon service », continue Gérard Pfauwadel. Et d’assurer, en écho à Bruno Le Maire, qu’ainsi, « aucune entreprise ne sera abandonnée seule face à ses difficultés ».
Pour y parvenir, le nouveau conseiller national devra garder à l’œil l’ensemble de ces professions du chiffre et du droit, qui sont en contacts avec les entreprises en difficultés : avocats, administrateurs judiciaires, banques, commissaires au compte, comptable, greffiers des tribunaux de commerce, etc. Les représentants de tous ces métiers siégeront au sein du comité national de sortie de crise, qu’il animera. Avec pour but de veiller à la bonne mise en œuvre du « plan d’action sur l’accompagnement des entreprises en sortie de crise », signé ce 1er juin à Bercy.
De l’engagement la bonne exécution
Concrètement, les banques y promettent d’organiser des rendez-vous de sortie de crise avec leurs clients, les avocats d’établir une liste de points de vigilances, les administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires d’établir un diagnostic gratuit… « Un engagement est une bonne chose, pointe Gérard Pfauwadel. Mais il est encore plus solide si l’on peut vérifier sa bonne exécution. Je n’ai pas autorité sur ces innombrables intervenants. Je compte plutôt y exercer un magistère d’influence. Et pour cela, la double onction du ministre de l’Economie et du garde des Sceaux, est plus qu’utile. »
Son poids, le Conseiller national à la sortie de crise le tiendra également d’une autre fonction : il présidera le comité consultatif qui instruira les demandes de financement auprès d’un nouveau fonds, annoncé ce 1er juin par le gouvernement. Ce fonds « de transition », doté de 3 milliards d’euros, est destiné à soutenir en quasi-fonds propres les grandes entreprises et celles de taille intermédiaire touchées par la crise sanitaire. L’assurance, pour le Conseiller, de se trouver au cœur de négociations sensibles, touchant quelques pépites tricolores.
Guichet unique
Sur le terrain, Gérard Pfauwadel aura pour rôle de coordonner et d’animer des comités départementaux à la sortie de crise, dont la création a également été annoncée ce 1er juin par Bruno Le Maire. Ces instances devront constituer « le guichet unique », dans les territoires, pour orienter les entreprises en difficultés parmi le foisonnement d’aides d’urgences. Mais aussi pour les orienter vers les tribunaux de commerce le cas échéant.
L’une des taches de Gérard Pfauwadel : démontrer que les responsables de ces comités départementaux, qui seront issus de la direction générale des finances publiques (DGFIP), ne doublonnent pas avec les sous-préfets à la relance. Ces derniers, eux aussi inventés par l’administration à l’occasion de la crise Covid, parcourent déjà depuis le début de l’année leurs territoires, pour signaler aux entreprises locales les aides du plan de relance auxquelles elles peuvent postuler.
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Pour tenir ce rôle de conseiller national à la sortie de crise, encore un peu flou et aux contours incertains, Bruno Le Maire a donc contacté il y a quelques semaines, Gérard Pfauwadel. Ce dernier, qui va fêter son 71ème anniversaire le 22 juin, a l’avantage de connaître l’entreprise comme l’administration. Depuis 2003, associé fondateur d’une société de management de transition, X-PM – fonction, il s’est frotté aux problématiques des restructurations de groupes en difficultés.
Travail bénévole
Il n’a jamais cessé pendant ces années de soigner son carnet d’adresses parmi les énarques et les inspecteurs des finances. Un précieux réseau constitué notamment après deux années, entre 1982 et 1983, comme directeur de cabinet de Michel Camdessus, alors directeur du Trésor avant de prendre la tête du FMI, puis comme secrétaire général du Comité interministériel de restructuration industrielle (CIRI), créé quelques mois plus tôt pour venir au secours de la sidérurgie en déroute. De 1988 à 1997, Gérard Pfauwadel a dirigé le Matif, premier marché de produits dérivés, né deux années plus tôt sous l’impulsion de Pierre Bérégovoy et son directeur de cabinet, Jean-Charles Naouri, aujourd’hui patron du groupe Casino.
Pour ses nouvelles fonctions de Conseiller national à la sortie de crise, Gérard Pfauwadel a souhaité ne pas être rémunéré. Il estime que cette décision le met à l’abri de conflits d’intérêts. « Cela me donne aussi plus de liberté d’action », assure-t-il. Or, des marges de manœuvres, au milieu de tous ces acteurs publics et privés qui s’affairent auprès des entreprises en difficultés, il va falloir qu’il s’en crée. En jouant des coudes.
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