Publié le : 20/05/2021 – 18:37
Parmi les deux concurrents qui ont reçu le feu vert du pouvoir syrien pour affronter Bachar al-Assad lors de la présidentielle du 26 mai figure l’opposant Mahmoud Mareï. Alors que le scrutin a commencé, jeudi, pour les ressortissants syriens vivant à l’étranger, la candidature de cet avocat passé par les geôles du régime entretient « l’illusion d’un exercice démocratique », selon Khattar Abou Diab, politologue spécialiste du monde arabe, interrogé par France 24.
« Je veux changer la structure du régime, passer d’une dictature totalitaire à un système démocratique. » Tel est l’ambitieux programme de Mahmoud Mareï, membre du Front démocratique syrien, l’opposition tolérée par le régime de Damas, et candidat à la présidentielle du 26 mai, face à Bachar al-Assad.
Un scrutin dont le coup d’envoi a été donné par les ressortissants syriens vivant à l’étranger, qui ont commencé à se rendre aux urnes, jeudi 20 mai, dans plusieurs ambassades à travers le monde.
L’avocat de formation à la fine moustache a été autorisé par la Haute cour constitutionnelle syrienne, à l’instar d’Abdallah Salloum Abdallah, député et ex-ministre d’État, retenu lui aussi parmi une liste de près de 50 prétendants, à tenter l’impossible.
Car bien qu’accusé par la communauté internationale de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, rien ne pourra empêcher Bachar al-Assad, qui avait remporté la présidentielle de 2014 avec plus de 88 % des voix, déjà à l’époque face à deux faire-valoir, de s’adjuger le scrutin.
Pourtant, Mahmoud Mareï, qui réside en Syrie et qui n’est pas reconnu par l’opposition en exil, assure, dans un entretien accordé le 18 mai à l’agence Associated Press (AP), qu’il est « un vrai candidat », à même de mettre un terme au conflit syrien. « Que je réussisse ou non, cela dépend du peuple syrien », assure-t-il.
Mahmoud Mareï, 67 ans et père de cinq enfants, affirme avoir été détenu pendant six ans dans les geôles du régime en raison de critiques proférées contre le système politique. Il déclare également à AP qu’il s’efforcera de mettre fin aux sanctions occidentales imposées à… Bachar al-Assad et à ses partisans.
« Une mise en scène absurde »
« Cet opposant de l’intérieur a beau dire qu’il est un vrai candidat, il n’en reste pas moins qu’il participe à une élection présidentielle que les observateurs, même les plus neutres, qualifient de mascarade, indique Khattar Abou Diab, politologue et consultant en géopolitique spécialiste du monde arabe. Le régime syrien est une République dynastique dans laquelle les Assad se succèdent les uns aux autres à la tête du pays, et par conséquent chaque scrutin présidentiel est en réalité une mise en scène absurde destinée à entretenir l’illusion d’un exercice démocratique et à consacrer cette continuité. »
Au pouvoir depuis 2000, Bachar al-Assad a succédé à son père Hafez al-Assad qui, avant lui, avait dirigé la Syrie trois décennies durant.
Selon Khattar Abou Diab, Mahmoud Mareï n’est pas dupe. « Les deux candidats ont été choisis par le régime pour jouer, comme au cinéma, un rôle de figurant au discours bien encadré par les services de renseignement, tandis que l’acteur principal, Bachar al-Assad, sera reconduit de facto au pouvoir, et ils le savent très bien. »
Un pays à genoux et divisé
Mascarade ou pas, la deuxième élection présidentielle depuis le début du conflit en 2011 intervient dans un contexte de crise dans un pays en ruines et à genoux économiquement. La guerre qui a coûté la vie à plusieurs centaines de milliers de personnes, et provoqué l’exode de millions de Syriens, a plongé plus de 80 % de la population dans la pauvreté, selon l’ONU.
Bachar al-Assad, qui semble se satisfaire d’une souveraineté limitée sur son propre pays – puisque le vote sera organisé uniquement dans les zones contrôlées par le régime –, s’est maintenu au pouvoir grâce au soutien de ses alliés russe et iranien, alors que les négociations engagées pour trouver une solution comprenant une transition politique sont au point mort.
« La Syrie a été anéantie par ces années de guerre et divisée en plusieurs zones désormais sous l’influence de plusieurs acteurs étrangers du conflit, dont la Russie, l’Iran et la Turquie, sans oublier des territoires toujours aux mains des jihadistes, conclut Khattar Abou Diab. La situation reste donc très instable et la crise économique s’aggrave jour après jour, mais tout ce qui compte aux yeux de Bachar al-Assad est de s’accrocher au pouvoir, la continuité avant tout. »
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