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Diana Buttu : « Pour Israël, les Palestiniens sont indésirables, quel que soit l’endroit où ils habitent »

Lors de la journée de grève commune aux Arabes israéliens et aux Palestiniens, à Jaffa (Israël), le 18 mai 2021. LAURENT VAN DER STOCKT POUR « LE MONDE »

Diana Buttu est une avocate canado-palestinienne, avec la citoyenneté israélienne, installée à Haïfa, dans le nord d’Israël. Ancienne conseillère juridique de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), elle suit de près le regain d’activisme des Palestiniens, aussi bien en Cisjordanie qu’en Israël.

La grève générale, organisée mardi 18 mai par les Palestiniens, a été massivement suivie, aussi bien en Cisjordanie qu’en Israël. Cette démonstration d’unité vous surprend-elle ?

L’idée de la passivité des Palestiniens d’Israël est un mythe. Parce que nous sommes un seul et même peuple, tout ce qui se passe dans une partie de la Palestine historique résonne dans toutes les parties de la Palestine historique. Quand Israël attaque Gaza, nous le ressentons à Haïfa. Quand les colons attaquent en Cisjordanie, nous le ressentons à Nazareth. Un exemple : en mai 2018, il y a eu une manifestation à Jérusalem-Ouest pour protester contre le déménagement de l’ambassade américaine et contre les tirs de l’armée israélienne à Gaza qui ont fait 60 morts ce jour-là. Des juifs israéliens et des Palestiniens d’Israël ont participé à ce rassemblement. Le lendemain, il y a eu une manifestation à Haïfa.

J’ai participé à ces deux événements et, à chaque fois, j’ai été frappée par la police. Ce qui est différent aujourd’hui, c’est que la protestation ne se limite pas seulement à Nazareth, Haïfa, Saint-Jean-d’Acre, Umm Al-Fahm et Sakhnin [les grands pôles de peuplement palestinien en Israël]. Le mouvement est beaucoup plus étendu. Il atteint des localités où l’on ne voyait jusque-là jamais d’action.

Quel est le point commun à ces manifestations, des deux côtés de la ligne verte (la ligne d’armistice de 1949, séparant Israël de la Cisjordanie) ?

C’est le sentiment que pour Israël, nous sommes indésirables, quel que soit l’endroit où nous habitons. Nous avons compris que le problème ce n’est pas le Hamas, ce n’est pas Gaza ou la Cisjordanie, c’est nous, en tant que peuple. Puisqu’Israël nous traite de manière indifférenciée, comme un seul et même corps, alors, la seule façon de regagner nos droits, c’est de confronter Israël de la même manière, comme un seul et même corps.

Quel a été le catalyseur de ce réveil ?

Sans les erreurs commises par le gouvernement israélien, tout cela ne serait pas arrivé. Benyamin Nétanyahou aurait pu jouer la désescalade. Au lieu de cela, il a choisi d’enflammer la situation. Il y a d’abord eu la coupure du haut-parleur de la mosquée Al-Aqsa, au début du Ramadan, puis les barrières disposées sur les marches de la porte de Damas, la décision de limiter l’accès à Al-Aqsa, l’ordre de tirer sur les fidèles et enfin le blocage des bus sur les autoroutes 1 et 6, qui arrivaient du nord d’Israël, pour empêcher leurs passagers de célébrer la nuit du destin, la plus sainte du ramadan, sur l’esplanade des Mosquées. On ne touche pas impunément à la religion.

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