Le 5 mars, Nadine, 35 ans, est dans son petit bureau de tabac de 12 mètres carrés des faubourgs de Vienne, en Autriche, qu’elle gère depuis des années. Son ex-compagnon, nommé Ashraf, rentre, verrouille la porte, ferme les stores, la frappe, puis l’étrangle avec un câble électrique. Il l’asperge d’essence avant d’allumer le feu. L’homme de 47 ans quitte les lieux en refermant la porte derrière lui. Alors qu’il fait démarrer sa voiture, la fumée alerte les passants, qui doivent casser les fenêtres pour tenter d’intervenir. Emmenée aux urgences, Nadine décédera un mois plus tard à l’hôpital.
Le 29 avril, dans l’un de ces HLM qui font d’habitude la fierté de la capitale autrichienne, Marija, 36 ans, infirmière, est chez elle en ce début de soirée. Dans des circonstances qui restent encore à éclaircir, Albert, l’homme avec lequel elle entretient une relation compliquée depuis des années, lui tire dans les jambes et dans la tête. La police arrive et arrête immédiatement Albert. Il est tellement alcoolisé qu’il doit être également emmené à l’hôpital, où son ex-compagne mourra dans la nuit. Elle était mère de deux enfants.
Survenus à quelques semaines d’intervalle, ces deux féminicides, auxquels s’ajoute le double assassinat, le 5 mai, par un ancien compagnon, d’une femme et de sa mère près de Salzbourg, ont secoué l’Autriche.
En s’interrogeant sur les raisons de cette série macabre, la petite République alpine a subitement redécouvert qu’avec plus de trente féminicides enregistrés chaque année, dont déjà onze pour 2021, le pays d’à peine neuf millions d’habitants est loin d’être exemplaire en la matière.
Mesures insuffisantes
Outre un taux de mortalité violente des femmes proportionnellement plus élevée, par exemple, que celui de la France, l’Autriche fait aussi partie des rares pays d’Europe où davantage de femmes que d’hommes sont assassinées chaque année. Cela est certes le signe d’une criminalité organisée très peu active sur son territoire, mais le quotidien de gauche Der Standard a titré « Le pays des femmes mortes ».
Lancée par l’auteur et musicien Gerhard Ruiss, une pétition signée par plus de 200 artistes autrichiens, intitulée « Cela nous concerne tous », a dénoncé « les mesures insuffisantes » du gouvernement « pour éviter que de tels meurtres monstrueux se reproduisent ».
Le chancelier conservateur, Sebastian Kurz, 34 ans, a en effet d’abord faiblement réagi. Celui qui préfère éviter le terme de « féminicide » pour parler de « meurtre de femmes » a convoqué une conférence gouvernementale, qui s’est entendue, le 3 mai, pour « améliorer les échanges d’informations » entre services.
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