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Dans les favelas de Rio, les narcopentecôtistes persécutent les pratiquants de candomblé

Par Bruno Meyerfeld

Publié aujourd’hui à 16h45, mis à jour à 16h56

La vieille porte de bois peinte en bleu résiste. Grince. Puis finit par céder. « Oh mon Dieu ! C’est terrible ! », hurle Carla (le prénom a été modifié), la voix étouffée par les larmes. D’un bond, la jeune femme de 37 ans se rue à travers les pièces du sanctuaire saccagé. Poussière jaunâtre. Herbes folles. Dentelle déchirée. Objets rituels brisés par dizaines, explosés au sol. Appuyée contre un mur, une petite poupée abandonnée, sa robe blanche ornée de perles et de coquillages, fixe d’un œil vide ce décor de désastre.

L’Ilê Axé de Bate Folha Yatemyquiamasia, un lieu de culte du candomblé, dans la ville de Duque de Caxias, une banlieue peuplée de Rio de Janeiro, a été ravagé par les narcotrafiquants.L’Ilê Axé de Bate Folha Yatemyquiamasia, un lieu de culte du candomblé, dans la ville de Duque de Caxias, une banlieue peuplée de Rio de Janeiro, a été ravagé par les narcotrafiquants.

« Je n’étais pas revenue depuis deux ans. C’est affreux. Ici, c’était un lieu de vie, de paix, de fête ! », sanglote Carla. Mis à sac par des assaillants, l’Ilê Axé de Bate Folha de la ville de Duque de Caxias, dans la banlieue nord de Rio, était autrefois, dans la région, l’un des principaux terreiros, lieux de culte du candomblé, une religion afro-brésilienne mêlant croyances chrétiennes et rites ­africains. Un endroit où, des décennies durant, fidèles et croyants dansaient en robes blanches ou tenues chamarrées, au rythme des tambours atabaques sacrés et des chants entonnés en langue yoruba, célébrant les pouvoirs de la belle Oxum, déesse noire des rivières, de la joie et de l’amour vrai.

Une atmosphère de terreur

Carla, qui fut initiée au culte ici même, se calme et s’assoit. « C’était le 11 juillet 2019. Il était aux alentours de 9 h 30 et il faisait très beau », commence-t-elle. Ce jour-là, Etelvina Souza Duarte, 85 ans, grande prêtresse du candomblé – mãe de santo Yatemyquiamasi, selon son nom religieux – vient passer un coup de balai dans son terreiro. Quelques minutes plus tard, on frappe à la porte. Face à la vieille dame, « trois garçons de moins de 25 ans en short et sandales, armés de pistolets ». L’un d’eux, menaçant, pénètre dans les lieux : « Maintenant, ma vieille, fini de plaisanter. Tu vas arrêter avec ta sorcellerie du démon ! »

Une heure durant, la mãe de santo est contrainte à briser elle-même, un à un, les objets sacrés de son sanctuaire. Les tenues rituelles et les instruments de musique, eux, sont jetés en pleine rue et incendiés. « Elle a essayé de les calmer, les a suppliés d’arrêter, elle pleurait », poursuit Carla. La barbarie prend fin au bout d’une heure avec l’arrivée de la police. Mais, le calme revenu, les fidèles épouvantés se résolvent à fermer le terreiro. « Tout ce qui était sacré a été détruit. Ce sont nos vies qui ont été brisées », soupire Carla.

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